Vous pouvez télécharger notre communiqué en cliquant ici.
DES SUCRES RAPIDEMENT DIGÉRÉS, RAPIDEMENT ÉVACUÉS…
La CGT n’a de cesse de se battre contre la casse du statut des fonctionnaires, la logique de privatisation qui conduit à la précarisation croissante des agent.e.s et à la mise en péril du service public. Nous avons toujours dit que la logique déployée par les gouvernements successifs allait plonger les travailleuses.eurs précaires dans une insécurité permanente et une position de fragilité propices à tous les abus RH : malheureusement, l’actualité nous donne raison !
Initialement recruté.e.s pour pallier temporairement le manque de magistrat.e.s et permettre la résorption des stocks, les juristes assistant.e.s (JA) devaient bénéficier d’une passerelle permettant de reconnaître le savoir-faire acquis en facilitant leur entrée à l’École Nationale de la Magistrature (ENM)… Beaucoup l’attendent encore et rares sont les agent.e.s ayant pu intégrer la magistrature par cette voie d’accès privilégiée. En quelques années, l’utilisation des JA s’est amplifiée et pérennisée, créant un goulot d’étranglement sur le 18-1 1. On leur a promis monts et merveilles mais les merveilles se sont envolées et les monts à grimper sont restés leur quotidien.
Depuis leur création en 2016, les JA sont devenu.e.s indispensables au fonctionnement de nos juridictions. En plus des 1 000 postes de JA créés en l’espace de 7 ans, le recrutement de plus de 1 000 agent.e.s supplémentaires d’ici 2025 a été annoncé. La loi du 20 novembre 2023 acte la disparition du statut de JA, remplacé par celui d’attaché.e de justice (AJ), dont les missions et le statut restent flous ! Les attaché.es de justice seront fonctionnaires ou contractuel.les avec un accès possible au CDI. Encore de belles promesses : les JA, dont les contrats de trois ans ne peuvent être renouvelés qu’une seule fois, dans la limite de six ans, ont enfin une perspective de CDI…Et, bien qu’une version du décret d’application nous ait été présentée en CSA – version que ne nous satisfait pas – nous attendons toujours sa publication.
Pourtant, beaucoup de JA, en poste depuis plus de 6 ans, attendent avec impatience cette entrée en vigueur pour accéder à un CDI. Certain.e.s se sont vus proposer un 3ème CDD, d’une durée d’un an, pour leur permettre « une pérennisation plus rapide » (cherchez l’erreur), quand d’autres n’ont eu tout simplement droit qu’à un aller simple pour France Travail ! Outre que ces pratiques relèvent de la maltraitance institutionnelle, l’administration semble avoir oublié qu’au-delà de 6 ans, le contrat proposé à l’agent ne peutêtre qu’un CDI, comme le prévoit le code général de la fonction publique.
Pour tous les autres, l’espoir de devenir attaché.e de justice avec un CDI persiste mais aucune garantie n’est donnée. L’administration se cache derrière l’indépendance dont disposent les juridictions dans le choix du recrutement des agents contractuels. La DSJ se borne à rappeler qu’un CDI peut être proposé à la fin du
1 |
L’article 18-1 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature permettait avant le 14 janvier 2024, sous certaines conditions, de devenir magistrat.e.s sans passer le concours de la magistrature |
|
en intégrant directement le corps des auditeurs de justice après avis favorable de la commission d’avancement des magistrat.e.s. |
|
premier contrat (3 ans) ou au terme des 6 ans, tout en insistant sur le fait que le renouvellement n’est pas de droit. Voilà qui devrait rassurer dans les services !
Pourquoi des CDI n’ont-ils pas été proposés aux JA en 2023 comme cela l’a été pour les autres contractuel.le.s.recruté.e.s dits « sucres rapides » dans le cadre du plan de la justice de proximité ? Pourquoi cela était possible pour d’autres par le passé mais pas aujourd’hui pour les JA ?
Peut-être parce qu’un.e contractuel.le en CDD a moins de marge pour négocier sa rémunération ou faire valoir ses droits, et qu’en période d’économie budgétaire, il est bien pratique d’avoir des petites mains, corvéables à merci, que l’on peut mettre en concurrence les uns avec les autres comme on le faisait avec la promesse de l’accès à l’ENM.
Niveau rémunération, on attend aussi que les choses bougent mais la DSJ ne semble pas pressée. Actuellement elle se négocie au cas par cas, dans un barème allant de 28 000 € à 32 000 € brut par an. Avec la création des attaché.e.s de justice, on aurait pu s’attendre à une progression mais aucune grille n’est encore communiquée alors que les postes d’AJ ouvriront le 1er novembre. Zéro visibilité pour les agent.e.s déjà en poste alors que l’administration vise un recrutement massif. Il est inacceptable que chaque personne sous contrat négocie son salaire et qu’il y ait des disparités entre les juridictions. Cette situation aggrave les inégalités déjà nombreuses entre JA et consacre un pouvoir discrétionnaire laissé à des individus qui n’hésitent pas à faire preuve d’arbitraire. Nous réclamons immédiatement la communication d’une grille indiciaire, seule capable d’assurer l’égalité entre les agent.e.s, de permettre aux collègues JA de se projeter et aux fonctionnaires d’occuper ces fonctions.
Il reste tant à dire sur la gestion calamiteuse de ce dossier par la DSJ. Citons par exemple :
- Les difficultés administratives liées au fait que les JA / AJ dépendent des magistrats auxquels ils ou elles sont rattaché.e.s tout en étant des agent.e.s contractuel.le.s assimilé.e.s aux fonctionnaires comme tous les autres contractuel.le.s (participation aux AG des fonctionnaires, soumission à la charte des temps – qui bien souvent n’est pas appliquée ! – etc.) ;
- Les missions floues qui pourraient empiéter sur les missions administratives actuellement gérées par les DSGJ sans ouverture de négociations statutaires ;
- La formation initiale inexistante et la formation continue peu accessible et souvent inadaptée ;
- Le manque de perspectives dans l’évolution de la carrière ;
- Le turnover important dans les fonctions, reflet de conditions de travail dégradées ;
- Les risques psycho-sociaux – déjà importants dans la justice – accrus par la précarité…
ARRETONS LA CASSE DU SERVICE PUBLIC ET LA PRÉCARISATION DES AGENTS ! DÈS MAINTENANT APPLIQUONS LA LOI VOTÉE ET REVENDIQUONS :
- Un CDI pour l’ensemble des JA actuellement en poste dans les juridictions ;
- Une revalorisation minimum à 32 000 € brut par an pour les JA et futur.e.s AJ ;
- L’arrêt du recrutement massif d’agent.e.s contractuel.le.s dans les services judiciaires ;
- La clarification des missions des futur.e.s attaché.e.s de justice et dans l’immédiat, le strict respect des missions présentées dans le cadre du recrutement et qui ont été contractualisées ;
- La communication d’une grille indiciaire de A type dans les plus brefs délais ;
- La fin d’une rémunération au cas par cas et une harmonisation des salaires par le haut ;
- La mise en place d’une véritable négociation de la rémunération en lieu et place de la mise en concurrence permanente calquée sur le privé ;
- La mise en place d’une politique d’intégration des AJ par une nouvelle voie d’accès ;
- Le recrutement massif d’adjoint.e.s administratif.ive.s, greffières.ers et de magistrat.e.s.
à Paris, le 12 juin 2024