Lettre à la garde des sceaux

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Dijon, le 11 mars 2014

Madame Christiane TAUBIRA Garde des sceaux,
Ministre de la justice

Ministère de la justice 13, place Vendôme 75042 Paris cedex 01

Madame la garde des sceaux,

Trop, c’est trop !

Nous avons déjà eu l’occasion de vous le dire, si nous avons accueilli votre arrivée au ministère avec sympathie et espoir, nous ne pouvons que constater, au fil des mois, que les espoirs que nous formulions pour un véritable changement, maintenant, de notre institution judiciaire oh combien sclérosée !, sont progressivement anéantis.

Manifestement, vous êtes toujours aussi mal conseillée !
Ainsi, depuis plusieurs semaines, nous recevons sur nos boîtes aux lettres des “lettre aux

magistrats et aux fonctionnaires de justice” officiellement signées par vous.
Si nous pouvions formuler des critiques, dans le cadre d’un débat démocratique, sur les

précédentes lettres, la lettre nG 8 de mars 2014 a atteint des sommets jusqu’ici inégalés !

D’emblée, une lettre consacrée à l’avancement et à la promotion des greffiers et greffiers en chef ne pouvait qu’attirer notre intérêt…. Las ! Son contenu est consternant ! Nous avons rarement vu, en si peu de phrases, autant de contrevérités assénées !

Ainsi, concernant l’avancement de grade, est-il indiqué que les critères pris en compte lors des C.A.P. “fondés sur le mérite”, “font désormais une place à l’ancienneté”…

Ceci est à tout le moins ahurissant !

En effet, concernant les greffiers, l’avancement au 1er grade se fait soit par examen professionnel, qui nécessite d’avoir une ancienneté certaine, soit par promotion au choix, qui implique à la fois mérite et ancienneté…

De fait, rien de modifié à ce niveau…

Concernant le corps des greffiers en chef, l’avancement de grade se fait, depuis la réforme statutaire de 2003, sur la base de l’ancienneté nécessaire pour passer l’examen, puis sur la base du “mérite” en fonction des notes obtenues aux épreuves tant écrite qu’orale.

De fait, rien non plus de modifié à ce niveau !

Nous nous interrogeons d’autant plus à la lecture de la suite : “…Cela permettra à un plus grand nombre d’agents d’obtenir un avancement…”.

En effet, quel que soit le système retenu, privilégiant l’ancienneté ou le mérite, le nombre d’avancements possibles est, depuis la mise en oeuvre de la L.O.L.F. au 1er janvier 2006, directement lié au régime dit des ratios “promus/promouvables” ou “propros”…

De fait, privilégier l’ancienneté sur le mérite, ou l’inverse, ne permet aucune promotion supplémentaire !

Mais ce n’est malheureusement pas fini !
Il est ainsi précisé que “le taux de promotion pour l’accès au 1er grade au titre des

années 2014 – 2015 – 2016 est fixé à 7 % pour les greffiers en chef, et à 5,5 % pour les greffiers…”. En l’espèce, le taux de promotion au 1er grade de greffier est fixé à 5,5 % depuis 2006,

soit l’un des taux de promotion les plus bas du ministère… sans évolution depuis cette date…

Quant au taux de promotion des greffiers en chef du 2ème grade dans le 1er grade, il était de 8 % depuis 2006 dans le cadre du ratio pro/pros, et il vient donc de tomber à 7 %… il s’agit donc d’une diminution du pourcentage de promotions possibles.

Concernant les greffiers en chef, vous indiquez : “…au titre des années 2013 et 2014, 70 promotions d’avancement au premier grade pourront être réalisées par voie d’examen professionnel”

Mais l’examen professionnel de 2013 est passé depuis longtemps, la liste des 40 collègues qui y ont été reçus publiée il y a près d’un an, et 32 ont d’ores et déjà réalisé…

Concernant les greffiers, il n’y a, là encore, aucune mesure nouvelle par rapport aux années antérieures, aucune amélioration.

Vous vous dites “…très attentive aux responsabilités qui sont d’ores et déjà confiées aux greffiers et aux greffiers en chef.”

Chiche !

Il y a une mesure, oh combien symbolique, et qui ne coûterait pas un centime de plus, c’est de profiter du départ annoncé de l’actuel directeur de l’École nationale des greffes pour le remplacer, enfin, par un, et même plutôt par une, fonctionnaire appartenant au corps des greffiers en chef.

Il s’agirait là d’un geste fort envoyé aux fonctionnaires des greffes ! Bien sûr, nous attendons d’autres mesures, comme, notamment :

– la gestion des juridictions confiée au corps des greffiers en chef, à l’exemple des hôpitaux où ce ne sont pas les médecins qui gèrent les établissements…

– la présidence des B.A.J. attribuée au corps des greffiers en chef ;

– la mise en état des procédures confiée aux greffiers, ainsi que l’exécution des décisions de justice, dans le cadre de la constitution d’un service public de l’exécution ;

– le repyramidage des postes de greffiers en chef de 2ème et de 1ère catégorie en échelle A et B, comme cela avait été acté dans le rapport d’étape du printemps 2001, avec le cabinet de Marylise LEBRANCHU, lorsque celle-ci était garde des sceaux ;

– la revalorisation des grilles indiciaires des corps de greffiers et greffiers en chef, l’indice majoré correspondant au 1er échelon du corps des greffiers étant toujours à ce jour officiellement inférieur au SMIC.

Si vous souhaitez prendre des initiatives “sans attendre l’issue des consultations en cours dans le cadre de la réforme judiciaire du 21ème siècle”, nous espérons qu’il s’agira de mesures à tout le moins consensuelles.

considération.

Je vous prie d’agréer, Madame la garde des sceaux, l’expression de notre parfaite

Pour le Syndicat National C.G.T., le secrétaire général,

Michel DEMOULE

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