Justice du 21ème siècle : quelques pistes de réflexions…

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La justice du 21ème siècle : quelques pistes de réflexion et de travail…

La direction des services judiciaires nous a donc transmis, le 13 février au soir, à la veille de la réunion du comité technique ministériel du 14 février, les scenarii de réforme annoncés dans la lettre de la garde des sceaux du 29 mars dernier.

Ce document se compose :

– d’un courrier de 2 pages de la garde des sceaux,
– d’un document de 4 pages sur “les problématiques”, sensé présenter “la synthèse des pistes de réforme, document qui permet de poursuivre le débat national en juridiction et d’en souligner les constats partagés”,
– d’un document de 4 pages sur “les questions”, “sous forme d’un questionnaire plus resserré qui constitue un outil plus facile à exploiter”…

* Sur “les problématiques” :

Le document rappelle que “le Président de la République a annoncé la mise en place d’une juridiction unique de première instance. Très discutée depuis de nombreuses années, sous différentes appellations, et confortée par le rapport des sénateurs Virginie Klès et Yves Détraigne, elle reste non seulement à construire, mais surtout à définir dans ses contours et ses contentieux”.

Rappelons tout d’abord que cette “JUPI” ne figurait ni dans le programme du parti socialiste pour la justice, ni dans les propositions du candidat François Hollande.

Ce serpent de mer qui ressurgit de l’imaginaire politique à intervalles plus ou moins réguliers, François Hollande ne l’a annoncé que dans son discours de janvier 2013 lors de la rentrée de la cour de cassation.

Nous avons déjà vécu à partir de 2008 une “réforme” de la carte judiciaire qui ne correspondait au programme ni de l’UMP ni du candidat Sarkozy (une région administrative = une cour d’appel, un département = un tribunal de grande instance), mais elle n’a pas touché au périmètre des cours d’appel et que très peu modifié le nombre des T.G.I. ; et entre la suppression de la fusion Vienne – Bourgoin- Jallieu, la réouverture de Saint-Gaudens, Saumur et Tulle et, sous forme de chambres détachées, de Dole, Guingamp, Marmande, Millau… ce n’est finalement qu’une quinzaine de T.G.I. qui auront été totalement supprimés, contre environ 200 tribunaux d’instance et 60 conseils de prud’hommes… pour le plus grand bonheur des avocats qui n’ont plus besoin de se déplacer dans ces juridictions sans représentation obligatoire…

N’oublions pas qu’interpellé à ce sujet, sur la base des documents détenus par la C.G.T. et qui démontraient que tout avait été décidé avant les remontées des consultations officielles, le secrétaire général Marc Moinard avait, en réunion de C.T.P.M., “vendu la mèche” en confirmant que tout s’était négocié dans l’été précédent avec le Conseil National des Barreaux…

Aujourd’hui, nous avons quelque peu l’impression de revivre le même scénario de série B:

Lors des réunions des groupes de travail, toutes les organisations syndicales représentatives, tant de fonctionnaires que de magistrats, se sont prononcées contre le tribunal de première instance.

Il semblerait que les choses évoluent puisque la C.F.D.T., qui tente peut-être comme après 1981 de devenir le syndicat maison du gouvernement “socialiste”, serait maintenant favorable au T.P.I., mais l’UNSA, traditionnel syndicat maison, y reste toujours opposée à ce jour…

Quels pourraient être les avantages de la création de la JUPI ? Qui y a intérêt ?

Rappelons là encore que, lors de la mise en place des groupes de travail Marshall et Delmas- Goyon en février 2013, la garde des sceaux mettait en avant l’accessibilité et la lisibilité de la justice…

– accessibilité :

En quoi la JUPI améliorerait-elle la situation ?

En effet, ce qui rendrait la justice plus facilement accessible, c’est le G.U.G., sous la forme du guichet universel de greffe imaginé dans le rapport Casorla de 1997, ce qui implique le développement et la mise en oeuvre pratique du logiciel Portalis (et non sous la forme du guichet unique de greffe, forme édulcorée d’un univers rétréci au canton et se bornant à être un service d’accueil amélioré pour peu que ce “GUG” soit doté de réelles compétences…).

Dans l’examen en commission du rapport d’information Klès-Détraigne, Virginie Klès indique “nous proposons de commencer par la mise en place du guichet universel de greffe, car c’est par le greffe que le justiciable entre dans le système judiciaire. Le guichet universel de greffe est donc prioritaire, de sorte que le TPI ne pourrait être qu’une étape ultérieure”.

Et, plus loin : “Le guichet universel de greffe est donc la première étape. Ensuite, on peut envisager à plus long terme la création du tribunal de première instance…”

Et, encore : “En conséquence, l’application Portalis doit être prioritaire”.

Et Yves Détraigne d’ajouter : “Pour Portalis…, la Chancellerie nous dit qu’en l’état actuel des choses, le développement durera quatre ans. Si on ne parvient pas à cela, il y aura une déception pour le guichet universel de greffe”.

4 ans !!! Alors que lors de l’audition par le groupe Marshall, les mêmes services estimaient à 10 ans, ce que nous avions traduit par 15 ans…

Mais si ce n’est que 4 ans (nous n’y croyons pas une seule seconde !), allons-y à fond sur Portalis pour la mise en place du GUG… et hâtons-nous lentement d’expérimenter la JUPI…

Par ailleurs, ne perdons pas de vue la 1ère des 44 propositions du Conseil National des Barreaux dans le cadre des groupes de travail 21è siècle : “La systématisation de la consultation rémunérée d’un avocat préalable à toute action juridique ou judiciaire pour une personne physique ou morale avec bénéfice de l’aide juridictionnelle sous conditions de ressources”…

L’accessibilité à la justice commencerait donc par la rémunération de l’avocat ! Même les notaires s’en étouffent !

– lisibilité :

Il ressort clairement de l’enquête récente concernant “l’opinion des Français sur la justice” (cf. Infostat Justice 125) que 88 % des Français connaissent et savent à quoi sert le conseil de prud’hommes, contre seulement 54 % pour le tribunal de grande instance…

Nous rappelons nos positions, déjà évoquées lors des groupes de travail, dans lesquelles nous affirmions que la lisibilité commence par un fléchage directionnel et un accueil de qualité au sein des juridictions.

* sur “les questions” :

Nous avons repris les questions posées par les scénarios en y ajoutant nos observations.

1. LE CITOYEN, ACTEUR DE SON PROPRE LITIGE

Pour permettre au citoyen d’être acteur de son propre litige, deux axes peuvent être retenus. Le premier porte sur la prévisibilité des décisions et du processus judiciaire. Le second cherche à favoriser la participation du citoyen à une solution négociée, qu’il s’agisse de la médiation ou de la conciliation.

A) Une meilleure prévisibilité des décisions

Appartient-il aux juridictions de participer à une meilleure information du citoyen sur le processus judicaire ? Et si oui, comment ?

* Par une information sur la procédure elle-même : identification précise des documents à fournir, durée moyenne de l’instance etc… ?

* Par une information sur le fond des décisions habituellement rendues dans une matière particulière ?
o En préalable : quel peut être l’équilibre entre harmonisation et pouvoir du magistrat d’apprécier les situations singulières ?

o Faut-il communiquer les grandes lignes de la jurisprudence concrète de la juridiction elle-même ? Pour ce faire, est-ce à la juridiction de la recenser elle-même ou faut-il créer un partenariat avec l’université ?
o Faut-il étendre le champ des référentiels types existants ? Comment les concevoir ?

Faut-il imaginer une participation de la société civile ? Comment les rendre publics ?

OBSERVATIONS DE LA C.G.T. :

L’administration de la justice (et notamment les services déconcentrés), en tant que service public, se doit d’apporter les informations nécessaires aux citoyens, aux usagers sur le processus judiciaire.

C’est là toute l’importance d’un accueil de qualité, réalisé par des fonctionnaires parfaitement formés à l’exercice et dans des conditions décentes.

Faut-il rappeler que la fonction d’accueil constitue l’essence même de la notion de service public quelle que soit l’administration concernée ?

Encore faut-il avoir les moyens nécessaires et suffisants pour y faire face en termes :

– d’implantations judiciaires… la réforme de 2008 ayant abouti à créer des déserts judiciaires et notamment concernant les juridictions de proximité (T.I. et C.P.H.) ;

– de personnels en nombre suffisant pour assurer au mieux la fonction d’accueil : alors qu’il s’agit d’une mission essentielle, celle-ci est régulièrement sacrifiée en cas de manque de personnels … combien de juridictions ont un répondeur téléphonique ? combien de juridictions sont obligées de fermer ce service, faute de d’agents ? …

La solution à ces dysfonctionnements majeurs ne passe pas par l’implantation de bornes visio qui bien souvent ne fonctionnement pas et/ou, lorsqu’elles fonctionnent, encore faut-il qu’il y ait un agent pour répondre derrière… une machine ne remplacera jamais l’humain…

S’agissant de la prévisibilité des décisions rendues, il faut craindre une augmentation des recours en réformation des décisions qui ne seraient pas celles attendues par le justiciable car, ne l’oublions pas, chaque situation est unique.

B) L’accès du citoyen à des modes négociés de résolution des litiges

Dans quelle mesure une juridiction peut-elle participer à la mise en œuvre d’une politique cohérente de médiation et de conciliation?

* Faut-il une politique commune et harmonisée de la conciliation et de la médiation ? o Menée avec toutes les professions du droit ?
o Etendue à toutes les juridictions d’un même ressort?
o Définie au niveau national ?

* Comment évaluer la politique de médiation et de conciliation ? Quels en seraient les indicateurs pertinents ?

* Faut-il une phase préliminaire obligatoire de conciliation ou de médiation?
o Avant ou après la saisine de la juridiction?
o Dans tous les contentieux?
o Y a-t-il des expériences concrètes dans vos juridictions ? Sont-elles efficaces ?

* Comment développer la procédure participative ?

OBSERVATIONS DE LA C.G.T. :

Si cette interrogation interpelle davantage les magistrats que les personnels de greffe dans la mesure où elle touche le fond du litige, il est tout de même permis de s’en étonner.

En effet, la fonction première du magistrat est bien de concilier les parties, or, hormis dans les C.P.H. où cette phase procédurale est bien identifiée, il est patent qu’elle est largement occultée pour les autres contentieux.

* Peut-on concevoir un acte de procédure d’avocat permettant l’établissement de la preuve avant et pendant le procès ? Quel gain en attendre pour la mise en état ?

OBSERVATIONS DE LA C.G.T. :

Par le recours aux modes alternatifs de règlements des litiges, à la médiation, par le formatage de la décision judiciaire, par la généralisation des barêmes d’indemnisation des victimes, par l’utilisation accrue de l’informatique, la réduction du temps d’audience, la généralisation de l’écrit et le recours obligatoire à l’avocat, tout est fait pour dissuader le recours au Juge et, ce faisant, diminuer l’accès à la Justice, désormais perçue comme un stock comptable qu’il convient de réduire drastiquement. La conciliation et la médiation ne doivent pas empêcher l’accès à une Justice gratuite.

2. TERRITOIRES, PROXIMITE ET SPECIALISATION

La mise en place d’une juridiction unique de première instance est au cœur de la réforme judiciaire mais elle reste à construire dans sa conception même : quel périmètre et pour quels contentieux?

OBSERVATIONS DE LA C.G.T. :

Si la C.G.T. est favorable à des regroupements de contentieux ou de missions selon des blocs cohérents, en particulier au sein des T.G.I. et des T.I., la C.G.T. ne voit aucun avantage, ni pour l’usager, ni pour les personnels, spécialement ceux du greffe, dans la mise en oeuvre d’une “JUPI”, superstructure tentaculaire, a fortiori fréquemment positionnée sur un niveau départemental.

Si le bloc de compétences est justement cohérent, si le service d’accueil devient une véritable composante des organigrammes, le justiciable de la vie quotidienne comme l’usager du

service judiciaire de proximité (nationalité, pacs, cession de salaire, procuration, renonciation, état civil, etc) trouveront tout au bon endroit, cela sera donc proche, accessible, compréhensible et efficace. Cette réponse sera encore plus pertinente si, comme nous le proposons in fine, le ministère veut bien développer de nouvelles compétences, spécialement pour le greffier en matière d’exécution des décisions.

Si, au sein d’un T.G.I. recomposé (avec des restructurations à envisager dans les chambres), on parvient déjà à récupérer les domaines commerciaux et ceux relevant de la sphère protection et sécurité sociale, à construire une justice publique de qualité dans ces domaines techniques, cela constituera un chantier majeur pour les prochaines années.

(Pour plus de détails, voir notre fiche thématique sur le T.P.I.)

A) Une juridiction en lien avec les territoires

Comment définir le territoire judiciaire ?
o Par un territoire coïncidant avec la carte territoriale administrative ?

OBSERVATIONS DE LA C.G.T. :

Dans l’absolu, il y aurait évidemment une logique à faire coïncider les cartes judiciaires et administratives, notamment dès lors que les cartes P.J.J. et pénitentiaire ont déjà été harmonisées…

Mais pour la C.G.T., le moment ne semble pas opportun, des réflexions étant actuellement menées en vue d’une modification de la carte territoriale administrative., ce qui aurait des conséquences y compris sur les cartes actuelles A.P. et P.J.J…

o Par une zone géographique présentant un ensemble de caractéristiques propres (géographiques, démographiques, économiques et sociales…) ?

Faut-il, pour des impératifs de lisibilité, de simplification et d’égalité de traitement des citoyens, fixer un cadre territorial standard et retenir un modèle unique de juridiction ?
o Le département est-il la structure administrative adaptée pour assurer la proximité comme la spécialisation ? Faut-il une seule juridiction de première instance par département ?

OBSERVATIONS DE LA C.G.T. :

Le département n’a pas spécialement la taille adéquate pour une “JUPI”, chaque département ayant ses spécificités tant géographiques que démographiques.

o La conduite de l’action publique et l’implication du ministère public dans les politiques partenariales doivent-elles conduire à la départementalisation de la juridiction ?
o Peut-on envisager un cadre territorial uniforme quand la diversification des organisations territoriales se poursuit (métropoles urbaines, etc…) ?

Peut-on envisager une organisation variable selon les territoires ? Comment ?

B) Une juridiction assurant proximité et spécialisation

Quel type de proximité promouvoir ?

OBSERVATIONS DE LA C.G.T. :

La seule proximité à promouvoir, c’est l’accès à la Justice pour tous ! La Justice doit pouvoir être accessible à tous les citoyens, mais pour celà, encore faut-il les moyens humains et matériels.

* Celle qui implique pour le citoyen d’être en capacité de se rendre physiquement dans une juridiction accessible (distance, transport) ? Ce type de proximité doit-il concerner tous les types de contentieux ?

OBSERVATIONS DE LA C.G.T. :

Bien évidemment, le citoyen doit pouvoir se rendre physiquement en juridiction et avoir accès à tous les contentieux.

* Celle qui résulte de dispositifs techniques, informatiques et procéduraux (points d’accès au droit, maisons de justice et du droit, guichets universels de greffe) :
o Par un accès à l’information et au droit ?

OBSERVATIONS DE LA C.G.T. :

Bien évidemment, là encore, les citoyens doivent avoir accès facilement à l’information et au droit, ils payent des impôts pour ça !

o Par la saisine d’une juridiction à partir de n’importe quel point du territoire ?

OBSERVATIONS DE LA C.G.T. :

Cette possibilité est bien évidemment très intéressante, … mais encore faudrait-il que Portalis (le Cassiopée du civil) soit opérationnel, or ce logiciel ne verrait pas le jour avant une quinzaine d’années… le guichet “universel” de greffe semble donc compromis pour l’instant !

Pourquoi ne pas développer la dématérialisation des procédures en ouvrant notamment la possibilité de saisir la juridiction par le biais de formulaires dématérialisés, par une saisine en ligne, où la saisie des champs obligatoires serait une condition sine qua non pour valider la demande ? Dans le même temps, cela constituerait un gain de temps pour les fonctionnaires qui n’auraient pas à ressaisir la demande, ni à la déchiffrer, ni à échanger des courriers pour demander des renseignements manquants…

o Par le suivi d’une instance à partir de n’importe quel point du territoire ?

OBSERVATIONS DE LA C.G.T. :

Là aussi, Portalis sera nécessaire… Là aussi la dématérialisation et son ouverture au justiciable peut être une piste. Cette solution a déjà été mise en place dans les tribunaux administratifs : lors de la saisine de la juridiction, un code d’accès est remis au justiciable qui peut, à partir du site internet “Sagace”, suivre l’état d’avancement de son dossier.

Cette solution permettrait au justiciable d’obtenir rapidement l’information sans avoir à se déplacer ou téléphoner dans la juridiction ; cela aurait également pour effet d’alléger la charge de travail des fonctionnaires face à ces demandes récurrentes.

* Certains contentieux pourraient être définis comme communs à tous les sites car impliquant une proximité. Selon quels critères ?
o La matière et l’enjeu du litige ?
o La simplicité de leur traitement ?

o Leur fréquence ?
o La vulnérabilité des publics ?
o La proximité des partenaires (PJJ, AP, partenaires sociaux) ?

OBSERVATIONS DE LA C.G.T. :

La C.G.T. signale que la réforme DATI a enlevé toute proximité, et que les C.P.H. et T.I., juridictions de proximité par excellence, ont été volontairement mises de côté par l’actuelle garde des sceaux…

* D’autres pourraient être regroupés sur un site unique afin de renforcer la collégialité et la spécialisation des magistrats. Selon quels critères ?
o La nature des affaires (responsabilité médicale, construction,…) ?

o Un volume d’affaires suffisant ?
o Le ministère d’avocat obligatoire ?

OBSERVATIONS C.G.T. :

La C.G.T. rappelle qu’elle est opposée à la représentation obligatoire qui entrave l’accès direct du citoyen à la Justice. Rappelons qu’une des parties du questionnaire est intitulée “le citoyen acteur de son propre litige”, ce qui est l’opposé de la représentation obligatoire, et les nombreux conflits entre les avocats et leurs “clients” sont là pour nous le rappeler au quotidien…

o L’environnement de spécialistes (assistants spécialisés, services d’enquête) ? o La dimension nationale ou internationale ?

L’organisation judiciaire prend en compte la spécialisation par un regroupement de certains contentieux dans des ressorts étendus (cour d’appel, niveau interrégional, niveau national). Faut-il accentuer ou redéfinir cette spécialisation et dans quels domaines ?

Une juridiction peut-elle moduler la répartition des contentieux dont elle a la charge entre ses différents sites ? (exemple: dans une juridiction unique X regroupant les sites A et B, on affecte le contentieux de la construction au site A et la responsabilité médicale et professionnelle au site B).

o Est-ce lisible et compatible avec le principe d’égalité des citoyens devant la justice ? o Comment encadrer cette répartition ? Selon quels critères ?

OBSERVATIONS DE LA C.G.T. :
Une répartition des contentieux entre différents sites ne ferait que rendre encore plus opaque l’organisation judiciaire.
3. UN NOUVEL EXERCICE DE LEURS MISSIONS PAR LES PROFESSIONNELS DE LA JUSTICE

Une justice plus efficace, efficiente en 1ère instance, conduit à s’interroger sur la manière de résoudre les litiges et de faire vivre la communauté de travail.

A) Une résolution des litiges ordonnée autour de la première instance
Le citoyen est en droit d’obtenir une décision de qualité dans des délais raisonnables.

OBSERVATIONS DE LA C.G.T. :

Ce constat est bien entendu une évidence, faut-il quatre rapports et un colloque pour s’en apercevoir ?

* Comment mobiliser tous les acteurs aux différents stades de la procédure pour y parvenir ?

OBSERVATIONS DE LA C.G.T. :

La présence effective des magistrats dans les juridictions permettrait d’assurer la pérénité du fonctionnement de l’institution judiciaire. Il faut également qu’ils se cantonnent uniquement à leurs seules prérogatives qui sont de trancher les litiges et de dire le droit.

De même, les demandes de renvoi dilatoires des avocats ne participent pas à une bonne gestion de la Justice.

* Comment enrichir et moderniser la collégialité ?

OBSERVATIONS DE LA C.G.T. :

La C.G.T. rappelle qu’elle est pour la suppression des juges de proximité qui servent de “bouche-trous” dans les formations collégiales et qui prennent des ETP aux juridictions.

* Quelles formations attendriez-vous de l’ENM et de l’ENG pour faciliter le travail en équipe, tant lors de la formation initiale que continue ?

OBSERVATIONS DE LA C.G.T. :

Il est nécessaire de mettre en place : une réelle formation initiale sur tous les applicatifs métiers, et avant les prises de poste. Dans le cadre de la formation continue, il est nécessaire de prévoir des mises à niveau.

* Comment accentuer le travail en équipe dans les services ? Comment les listes de discussions peuvent-elles être encore mieux utilisées ?

OBSERVATIONS DE LA C.G.T. :

Que cache-t-on derrière cette notion de “travail en équipe” ou encore derrière la notion de “communauté de travail” ? S’agit-il encore d’un moyen pour les magistrats de se décharger sur les fonctionnaires?

Une verticalisation accrue des taches afin de renforcer le travail à la chaîne, faisant ainsi perdre tout son sens à l’activité judiciaire?

* La réforme de la justice doit-elle également concerner l’appel ?
o Faut-il continuer à envisager l’appel comme une voie d’achèvement, l’entier litige étant réexaminé en tenant compte de son évolution ?
o Faut-il le concevoir comme une voie de réformation (critique de la décision de 1ère instance, sans modification des données et des arguments) ?
o Doit-on privilégier une voie médiane, par exemple une formation chargée d’examiner la recevabilité des moyens nouveaux ?

B) Une communauté de travail judiciaire au service du citoyen

Comme nous avons pu le développer dans nos écrits, le but de l’opération menée par le ministère est de décharger le magistrat sur le fonctionnaire. Les quatre rapports remis à la Garde des Sceaux epliquent que cette évolution est nécessaire car vont bientôt manquer 1400 magistrats.

Une question déjà, pour pallier le manque d’effectifs d’une profession faut-il se décharger sur une autre ? Le point de départ de la réflexion semble donc déjà biaisé.

Le deuxième argument utilisé est le fait que 80% des greffiers auraient bac+4 ou bac+5 et qu’ils sont compétents. Ce niveau de diplôme est une réalité pour ce qui concerne les recrutements récents (ce n’est pas la situation de l’ensemble du corps) mais, bizarrement, sur le terrain, personne ne s’intéresse à la compétence des greffiers et ces derniers sont nombreux à signaler le manque de considération que l’on a pour eux.

Certains magistrats veulent profiter de ce transfert pour leur donner les tâches qu’ils considèrent comme subalternes.

De là à dire que l’argument du départ massif de magistrats à la retraite n’est utilisé que pour mieux faire passer la pilule, c’est un pas que nous n’oserons pas faire… Il est donc proposé de donner plus de travail aux greffiers alors que 2000 fonctionnaires vont partir à la retraite et qu’actuellement, seulement 1100 ont été recrutés.

De plus, connaissant le système actuel de fonctionnement interne de nombreuses juridictions, allons-nous nous retrouver avec des adjoints administratifs faisant fonction de greffiers “juridictionnels” eux-même faisant fonction de magistrats ?

(Pour plus de détails, voir nos fiches thématiques : agents de catégorie C, secrétaires administratifs, greffiers et greffiers en chef)

L’assistance à la rédaction fait actuellement partie des missions du greffier. Est-ce une réalité effective dans vos juridictions ? Si oui, dans quels domaines ?

OBSERVATIONS DE LA C.G.T. :

La C.G.T. rappelle que depuis 2003, l’assistance à la rédaction fait partie des missions du greffier ; le rapport DELMAS-GOYON l’a découvert, preuve que les statuts des fonctionnaires sont quasi ignorés par notre administration et par les magistrats.

Mais il est vrai que les magistrats préfèrent bénéficier de l’aide d’un assistant de justice plutôt que celle d’un greffier.

Les greffiers sont des techniciens de la procédure. Faut-il prévoir une participation accrue du greffier dans la mise en état du dossier, la pré-rédaction? Peut-on envisager au parquet, un renforcement de son rôle à la permanence ?

OBSERVATIONS DE LA C.G.T. :

S’agissant de la mise en état, la C.G.T. est favorable à ce que dans les C.P.H., les greffiers puissent assurer un suivi du dossier. En revanche, nous sommes opposés aux audiences de mise en état qui rallongent les délais des procédures.

Pour assurer un meilleur suivi des dossiers et pour empêcher les renvois abusifs, le système de bulletins de renvoi pourrait être généralisé à toutes les juridictions.

En revanche, la C.G.T. ne comprend pas ce qui se cache derrière la notion de “pré- rédaction”.

S’agissant de la permanence du parquet, la C.G.T. rappelle que les tâches des fonctionnaires y sont des tâches purement administratives et non judiciaires. Il est essentiel de le rappeler car les orientations prises actuellement visent à décharger les magistrats du parquet sur les fonctionnaires et notamment sur les greffiers.

Quels sont les domaines où les greffiers en chef, les greffiers, les secrétaires administratifs et les adjoints administratifs et techniques pourraient améliorer le service rendu au justiciable ?

OBSERVATIONS C.G.T. :

Pour la C.G.T. il est nécessaire que chaque corps soit positionné sur le poste qui est le sien dans l’intérêt d’une bonne justice et d’une clarification des statuts nécessaire pour une revalorisation des grilles indiciaires de l’ensemble des corps.

De même, nous revendiquons la création d’un corps de techniciens informaticiens ainsi que la fusion des C techniques avec ceux existants dans la pénitentiaire permettant ainsi l’accès à des corps de B et A techniques. L’emploi public serait préservé et permettrait de réduire le recours systématique aux coûteuses sociétés privées ou aux agents non-titulaires.

Comment promouvoir un travail d’équipe avec les assistants de justice et/ou les assistants spécialisés? Faut-il d’autres compétences, d’autres profils ?

OBSERVATIONS DE LA C.G.T. :

La C.G.T. rappelle qu’elle n’est pas favorable au recrutement d’assistants de justice. Rappelons que l’actuel statut des greffiers, notamment son article 2, permet déjà de confier un certain nombre de tâches aux greffiers, ainsi en matière de recherches juridiques, de rédaction…

Comment faut-il concevoir les relations de travail entre les juridictions et les auxiliaires

de justice ? Par des échanges institutionnalisés réguliers ? Dans quel cadre et à quel niveau ?

Comment mieux organiser les relations avec nos partenaires (élus, administrations, associations et usagers) ? Quelles sont les pratiques qui existent dans vos juridictions ?

En guise d’éléments de conclusion :

La garde des sceaux écrit qu’elle prendra rapidement des initiatives quant à une “évolution statutaire des personnels de greffe”. Si, pour la C.G.T., des évolutions de nos métiers sont nécessaires et utiles, nous maintenons qu’elles ne pourront pas se faire à n’importe quel prix !

Nos métiers, tels qu’ils sont à l’heure actuelle et quelle que soit notre catégorie ou notre fonction, méritent déjà d’être reconnus à leur juste valeur car nous, fonctionnaires de la justice, sommes l’ossature du service public de la justice.

Dans son propos introductif aux scenarii, la Garde des sceaux indiquait que le débat sur l’évolution statutaire des personnels de greffe doit se faire « dans la sérénité ».

De quelle sérénité parle-t-on alors qu’il n’est même pas question de revalorisation de nos grilles indiciaires et que le point d’indice est gelé depuis 2010 ? Qu’il n’est que question de nous rajouter des tâches supplémentaires alors qu’il y a déjà une charge de travail importante ? Enfin, alors que nous risquons de subir de plein fouet une réforme de la carte judiciaire bis, encore plus douloureuse que la précédente ?

Faut-il accepter tous les transferts de taches possibles et imaginables des magistrats sur les greffes pour être enfin reconnus et gagner 5 points d’indice ? Où est l’opportunité dans ce cas ?

Ne cédons pas aux belles paroles de ceux qui, sous couvert de décharge totale d’activité, nous parlent d’opportunités à saisir alors qu’ils ne travaillent plus ou pas en juridiction et alors même que nous risquons de subir une nouvelle surcharge d’activité sans rémunération supplémentaire et sans statut adapté.

Stoppons la démagogie, arrêtons de servir les intérêts de ceux qui s’enrichissent de nos compétences !

A Paris le 28 février 2014

N.B : lors de la réunion du comité technique ministériel, après avoir entendu les déclarations liminaires des organisations syndicales de fonctionnaires et les observations des organisations syndicales de magistrats, toutes critiques, la garde des sceaux a notamment déclaré :

“… si vous ne voulez pas de réforme, vous n’en aurez pas…” “…le COPIL a travaillé en anticipation, j’ai annoncé que j’allais transmettre les scénarios, ils ont été transmis…” “…la juridiction unique est en discussion…” “…rien ne convient, rien ne va, rien n’aboutit…” “…je ne ferai de violence à personne…” “…ce dont vous ne voulez pas, vous ne l’aurez pas !…”

Donc pas de défaitisme ! Pas de “de toutes façons, tout est déjà décidé” !

Nous avons encore et toujours la possibilité de bloquer de mauvais projets et de proposer des améliorations du fonctionnement de l’institution !

Hollande et son gouvernement n’arrêtent pas de céder sur leur propre programme, sur les propositions de leur propre parti, il n’y a pas de raisons que nous ne les fassions pas reculer sur la JUPI, aussi nuisible sinon plus que la carte judiciaire de Dati !

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