Déclaration liminaire au comité technique ministériel du 23 juillet 2020

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Déclaration liminaire au

CTM du 23 juillet 2020

Monsieur le ministre,

Vous prenez vos fonctions dans le cadre d’un remaniement pour changer de cap afin de continuer la même politique. Vous deviez nous recevoir hier, dans l’urgence, en limitant le nombre de représentants syndicaux au prétexte du respect des mesures sanitaires. Concept à géométrie variable car personne ne s’émeut quand des agents s’entassent à 5 ou 6 dans un bureau de 12m². Comme si le ministère n’avait pas de salle suffisamment grande pour permettre une meilleure représentation des organisations syndicales par direction !

Nous ne reviendrons pas sur la calamiteuse gestion de la crise sanitaire. Nous rappelons juste que ce n’est pas une aumône sous forme de prime à usage unique et dont la répartition est ultra discrétionnaire qui viendra saluer l’implication des agents. L’opacité et l’iniquité de traitement des agents dans le versement de cette prime aura sans nul doute des répercussions en cas de nouvelles crises. Seule une véritable revalorisation du point d’indice permettra cette reconnaissance professionnelle des agents du ministère de la justice et de la fonction publique en générale.

Ce premier comité technique à la suite de votre prise de poste qui n’a vocation à aborder qu’un seul point à l’ordre du jour met en exergue le peu d’intérêt que ce ministère porte à ses agents. Ce point vient enfin réguler le cadre administratif des Professeurs Techniques de la PJJ qui oscillent depuis plusieurs années entre extinction du corps, renvoi vers l’éducation national ou maintien au sein du ministère. Après tout, les Professeurs Techniques de la PJJ attendent cela seulement depuis 3 ans.

Pour résumer votre proposition : un allongement conséquent de la carrière pour espérer atteindre un 7ème échelon hors classe. Sachant que les critères de l’avancement établis par le projet viennent restreindre les possibilités et donc le nombre d’agents promus.

La réévaluation de la grille indiciaire nous étonne car basée sur celle des psychologues de la Fonction Publique Hospitalière, alors que nous aurions pensé un alignement sur la grille des professeurs de lycée professionnel de l’Éducation Nationale. Cette correspondance aurait eu la logique d’être dans la lignée des projets de la DGAFP d’intégrer le corps des professeurs techniques PJJ au sein de ce ministère.

S’il est important de réguler la situation administrative des professeurs techniques PJJ, il y aurait eu, selon nous, des sujets tout aussi urgents à ajouter à ce CTM. En voici une liste non exhaustive par direction.

Concernant la Protection Judiciaire de la Jeunesse :

Dans votre réponse en commission parlementaire, vous avez indiqué avoir consulté des magistrats sur la nécessité de la réforme de la justice des enfants. C’est bien, mais ils ne sont pas les seuls acteurs de la justice des enfants. Il serait de bon aloi de consulter également les professionnels de terrain de la PJJ ou vos anciens confrères.

Vous apprendrez ainsi, que si nous sommes nombreux à demander une réforme de l’ordonnance de 45, nous sommes tout autant à rejeter le projet imposé par voie d’ordonnance par votre prédécesseure.

La CGT vous demande de renoncer à ce texte et de revenir à la table des négociations. Seul un travail conjoint de l’ensemble des acteurs et professionnels du secteur permettra d’établir un véritable code de l’enfance en danger dans lequel la protection et l’éducatif de ces enfants seraient au centre de toutes les décisions et actions.

La CGT vous demande également de rompre avec cette logique de transposition totale du droit des majeurs (bloc peines) aux droits des enfants.

La PJJ n’est pas une administration de probation, les buts et objectifs auxquels concourent les agents de la PJJ doivent rester axés sur l’éducatif. La militarisation de nos missions n’est pas non plus une bonne chose, l’expérience EPIDE a déjà été tentée, sans succès. Penser qu’un encadrement « militaire» réussira là où échoue l’éducatif est une erreur, et revient à nier la spécificité de notre public et donc de nos métiers.

Au-delà de cette question primordiale sur le métier, la CGT vous demande expressément de reprendre la négociation statutaire pour une véritable revalorisation indiciaire des éducateurs qui ont été lésés par la réforme de la filière socio-éducative.

De plus, si l’administration a rejeté la proposition de la CGT de rénover le corps des CSE PJJ aux fins de créer un corps de cadres éducatifs, vous ne pouvez pas laisser ces agents dans un corps en un seul grade.

Enfin, les futurs cadres éducatifs de la PJJ seront les seuls encadrants de la fonction publique d’État à n’avoir que 2 grades. La CGT exige l’établissement d’un 3ème grade dont la grille indiciaire restera à déterminer conjointement.

S’agissant du statutaire, la CGT demande la revalorisation réelle des différentes indemnités (nuits, week-ends, astreintes, camps, jours fériés…) qui n’ont pas été revues depuis 30 ans pour certaines.

La CGT demande une augmentation en lien avec l’inflation annuelle durant ces années, valeur bien éloignée de l’aumône proposée par la DPJJ sortante à la DGAFP.

Pour clore cette longue liste de sujets urgents, il y a celui des corps communs qui n’appartiennent à aucune direction en propre et qui se retrouvent trop souvent oubliés de toute revalorisation salariale ou de progression. Par exemple, les adjoints techniques, agents de catégorie C qui n’ont aucune possibilité de progression professionnelle puisqu’il n’existe pas d’agents techniques de catégorie B ou A à la PJJ, à l’inverse de l’administration pénitentiaire.

Concernant la Filière Insertion – Probation :

La CGT a pleinement pu mesurer au cours des dernières semaines quelle était la valeur accordée à la parole de l’état, qui s’ajoute à l’absence totale de politique volontariste pour mettre en œuvre une réelle égalité femme-homme, au sein du Ministère de la Justice. Par ces propos sont visés le déploiement de la LPJ au sein des SPIP, la réforme statutaire de la filière Insertion Probation comme la réforme de sa mobilité.

Le déploiement de la LPJ à marche forcée s’est fait dans la confusion la plus totale. Aucune consigne claire, aucune information quant aux conséquences des modifications des nouvelles mesures créées et surtout aucun renfort en personnel , contrairement aux effets d’annonce, pour absorber cette charge de travail.

Réforme statutaire des CPIP ensuite: alors que ses effets seront totalement mis en œuvre à compter du 1er janvier 2021, la question de l’alimentation du nouveau grade créé, dénommé classe exceptionnelle, restait en suspens puisque le taux de pro/pro devant l’accompagner n’était toujours pas publié. Lors du vote de cette réforme aux CT SPIP comme au CTM en date des 2 et 5 mai 2017, le Ministère affirmait avoir obtenu une RIME de Matignon pour l’octroi d’un taux dérogatoire exceptionnel (30 % était avancé) durant la phase transitoire. Le verdict est tombé en juin 2020, soit plus de 3 ans après. Il sera de 9 %. Nous constatons donc la valeur de la parole des décideurs d’hier, pour certains pourtant aujourd’hui en place au Ministère, mais plus encore la valeur de la parole de l’État. Nous demandons à ce que ce taux soit revu et que les engagements pris au plus haut niveau soient enfin respectés.

Réforme statutaire des psychologues encore qui se fait attendre depuis deux ans aujourd’hui. Il est temps d’enfin accorder un statut à nos collègues et pérenniser leur présence dans ce Ministère. Cela n’a que trop duré.

Réforme de la mobilité enfin: depuis la loi de destruction de la Fonction Publique du 6 août 2019 et des LDG ministérielles qui en ont découlé, les décisions de mobilité se font en toute opacité et créent de la rancœur chez les agents par la tenue d’entretiens de sélection aussi inutiles que porteurs de discriminations sexistes ou syndicales. De la même façon, jamais les retours de congés parentaux, de disponibilité ou de détachement n’ont été gérés de façon aussi malveillante, dans l’irrespect le plus total des textes qui les encadrent. Nous exigeons le rétablissement des prérogatives des CAP, ces instances étant les seules à garantir une égalité de traitement entre les agents.

Concernant la CGT Chancelleries & Services Judiciaires :

Nous rappelons que la CGT des chancelleries & services judiciaires refusait toute bilatérale avec votre prédécesseure depuis plus d’un an puisqu’elle était incapable de tout dialogue et encore moins d’une écoute sérieuse, tout juste polie, des revendications que nous portons dans l’intérêt des personnels et des usagers. En revanche, elle a su se montrer particulièrement reconnaissante à l’égard des organisations syndicales complaisantes à son égard, puisqu’au mépris de l’avis émis par la CAP réunie le 19 juin dernier, elle a promu au choix une représentante nationale de l’une d’entre elle. Aussi, aujourd’hui comme hier, la figuration ne nous intéresse pas le moins du monde et nous ne perdrons pas notre temps si les mauvaises pratiques devaient perdurer.

Cela fait longtemps que les services judiciaires n’ont pas vu la couleur des augmentations, toujours annoncées en fanfare, du budget.

L’administration et les gouvernements successifs ont pris, tardivement et insuffisamment, la mesure des besoins en recrutements de personnels titulaires, ce qui se traduit aujourd’hui par une forte pression et une charge de travail importante pour les personnels de l’école nationale des greffes (ENG) chargés d’assurer la formation de nouveaux arrivants, conjuguées à un management défaillant qui a accentué leurs difficultés.

Et dans le même temps, le dégraissage se poursuit, puisque la CLE 2020 laisse apparaître de nouvelles suppressions de postes, depuis 2017, pas moins de 375 auront été supprimés !

En revanche, on a vu les réformes s’enchaîner sans les moyens humains adéquats, avec des outils informatiques encore plus inadaptés. Les actes gestionnaires se sont également multipliés par des privatisations successives. La fusion des juridictions a éloigné encore un peu plus l’usager de la justice et les moyens des tribunaux de proximité et conseils de prud’hommes ont été sacrifiés au profit des tribunaux judiciaires qui pour autant ne s’en sortent pas mieux.

Nous estimons qu’une bonne administration de la justice, une justice de qualité pour les usagers, qui leur soit accessible doit passer entre autres par la garantie offerte du greffier à l’audience et par la revalorisation des métiers du greffe. Les prérogatives et les champs d’interventions des fonctionnaires des greffes doivent être réaffirmés et/ou renforcés

La revalorisation des métiers du greffe, à dominante largement féminine et le rétablissement a minima de l’égalité femmes-hommes doit passer par une augmentation significative des grilles : vos services eux-mêmes établissent la différence entre les greffiers, recrutés à bac +2, et la moyenne des B, recrutés à bac, à – 13 % (InfoStat Justice juin 2019)…

Enfin, nous exigeons que toutes les mesures nécessaires soient prises pour assurer la santé des collègues largement exposés au coronavirus en Guyane et à Mayotte, et qu’ils puissent assurer la garde de leurs enfants par le maintien du dispositif des ASA pour garde d’enfants, les structures d’accueil et centres aérés étant fermés pour raisons sanitaires.

Ce ne sont que quelques premières observations générales, notre organisation syndicale vous exposera plus largement ses orientations pour l’administration centrale et les services déconcentrés à l’occasion d’une rencontre en bilatérale que nous vous demanderons dès que possible.

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