Audition de la CGT sur les chantiers de la justice

 

Syndicat National CGT
des
Chancelleries et Services Judiciaires

« Chantiers » de la justice : quel avenir pour le service public de la justice et ses agents ?

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Le 5 octobre 2017, la garde des sceaux a annoncé en grandes pompes le lancement de 5 chantiers sur la justice. Novlangue, langue de bois, impossibilité de poser des questions, aucun document remis : le dialogue social et la transparence promis n’étaient pas au rendez-vous.

Pour chacun de ces « chantiers », deux chefs de file ont été désignés parmi lesquels 4 avocats, un patron de Bouygues (d’où sûrement le terme de « chantier »), 2 magistrats retraités, un professeur et 2 magistrats en activité. Constat : la part belle est faite au privé (la moitié des « chefs de file »), seulement deux agents salariés par le ministère de la justice et surtout aucun fonctionnaire.

Nous avons certes été entendus (de là à dire que nous avons été écoutés…) sur nos revendications, mais il était difficile de se prononcer sans avoir communication des projets… Dans les greffes l’inquiétude est grande au vu des nombreuses rumeurs qui courent.

Quelle organisation territoriale pour quelle justice ?

Le « chantier » sur l’organisation judiciaire a été confié à deux avocats qui n’ont bien évidemment pas les mêmes intérêts que les usagers ou les agents du service public de la justice. Ce choix n’est évidemment pas innocent.

Une réorganisation territoriale, à la fois au niveau départemental et à la fois au niveau régional, est envisagée alors que nos juridictions se remettent à peine du traumatisme qu’a été la réforme de la carte judiciaire avec la suppression de près d’un quart des juridictions. Pour exemple, dans le ressort de la cour d’appel de Riom, ce sont 1/3 des juridictions qui ont été supprimées et jusqu’à la moitié pour le seul département du Puy-de-Dôme. Les regroupements ont été l’occasion de supprimer des postes en ne remplaçant pas des départs à la retraite ou en mutation.

=> au niveau départemental, un tribunal unique ?

La garde des sceaux a déclaré lors de la présentation du budget « qu’aucun projet de modification de la carte judiciaire ni aucun projet de suppression de site n’existait dans les cartons du ministère » et pourtant le Sénat a adopté le 25 octobre 2017 une proposition de loi visant (notamment) à créer un tribunal unique départemental… De qui se moque-t-on ?

Cela fait depuis au moins 1997 que certains promettent la création d’une juridiction départementale unique qui regrouperait toutes les juridictions de première instance (CPH, TGI, TI, TASS, TCI…). Cela faisait partie de la feuille de route donnée par Hollande à Christiane Taubira, mais cela figure également dans le projet de Macron qui propose ainsi la création dans chaque département d’un « tribunal de première instance [TPI] qui fusionnera l’ensemble des tribunaux locaux spécialisés de première instance. » Et les anciens sites ? « Nous créerons un service d’accueil unique du justiciable sur les anciens sites des juridictions fusionnées ». On imagine que les anciens TI ou CPH ne deviendraient plus que des lieux d’accueil regroupant quelques agents, et effectuant des tâches déléguées par le TPI où tout serait concentré.

Ce projet est déjà en marche progressive grâce à différents biais :

*création du tribunal des affaires sociales : à compter du 1er janvier 2019, le TASS (tribunal des affaires de sécurité sociale) et le TCI (tribunal du contentieux de l’incapacité) seront regroupés au sein du TGI ;

*casse des CPH : la loi Macron est venue casser les prud’hommes entrainant une baisse conséquente des procédures (- 40% dans certaines juridictions). La suppression de l’élection des conseillers a également pour but d’affaiblir cette juridiction en vue de son intégration au TPI. Les CPH ne sont pas concernés par la proposition de loi mais gageons qu’ils le seront bientôt ;

*démantèlement des TI : le transfert de la police vers le TGI est une nouvelle étape dans le processus de dépeçage des TI. De plus, plusieurs ressorts de cour d’appel vont laisser tout ou partiellement compétence de la police au TI en leur donnant délégation alors que des postes ont été supprimés dans les TI du fait du transfert. Un autre pas vers le TPI ;

*mise en place du SAUJ : les SAUJ (service d’accueil unique du justiciable) sont également une étape vers le TPI en unifiant tous les accueils au niveau départemental. Dans son projet de TPI, Macron prévoit même qu’en lieu et place des juridictions supprimées, il ne reste plus que le SAUJ  ;

*mutualisation des greffes : en 2015 comme en 2016, nous avons mobilisé nos collègues contre un amendement déposé par le sénateur Detraigne qui prévoyait une mutualisation des greffes des CPH, TGI et TI sous la coupe du président du TGI. Grâce à la mobilisation, ces deux amendements n’ont pas perduré. Cependant, un décret du 6 avril 2017 est venu (en remplacement) assouplir considérablement les conditions de délégation des agents par les chefs de cour et est venu créer une délégation par les chefs de juridiction au sein des chambres détachées existant actuellement. Encore un avant-goût du TPI…

*suppression de postes de directeurs de greffe : une des conséquences du protocole de juillet 2014 est la suppression de très nombreux postes de directeurs en TI et en CPH (75 entre 2015 et 2017) pour les remplacer par des B fonctionnels, postes qui ont d’ailleurs du mal à être pourvus. Ce dépyramidage de A en B aura notamment pour but de faciliter l’intégration des TI comme chambres détachées du TPI.

Pourquoi vouloir créer le TPI ? Une des raisons avancées est une question de lisibilité pour les usagers du service public de la justice. Or, l’argument est bien évidemment fallacieux. Les buts de ce projet sont de pouvoir mutualiser à la fois les effectifs et le budget. La mutualisation des effectifs sur une seule entité entraînerait une dégradation des conditions de travail des agents qui pourraient être envoyés sur les différentes chambres détachées du TPI. Cela entraînerait également la suppression des fonctions de « placé », au vu de la souplesse en terme d’effectifs qui résulterait de la mise en place du TPI.

La mutualisation des budgets de fonctionnement, déjà en partie mise en place avec les arrondissements budgétaires qui n’ont aucune existence juridique, entraînerait une nouvelle diminution desdits budgets qui baissent de façon continuent.

Les seuls à être favorables à la création des TPI sont les chefs de juridiction des TGI (et du plus gros lorsqu’il y en a plusieurs dans le département) car ils se verraient bien à la tête d’une structure beaucoup plus grande qui leur permettrait de renforcer leurs pouvoirs et leurs indemnités.

Quelles seraient les conséquences d’une telle réforme ?

* accentuer la main-mise des magistrats sur le greffe, dont certains voudraient voir la disparition du corps des directeurs ;

* accroissement de la taille des structures qui entrainerait une augmentation des délais de traitement des dossiers. Ainsi, alors que les TI connaissent des bons de délais de traitement, on voudrait les intégrer aux TGI qui, selon le projet de loi de finance 2018, sont « la juridiction la plus en difficulté » et dont « les délais de traitement […] augmentent sans paraître maitrisés ». Dans la justice, plus une structure est importante, moins elle fonctionne !

* les agents seront affectés départementalement, et non plus par juridiction. Sur décision des chefs de juridiction, le directeur de greffe n’étant que consulté, les agents pourront être délégués sur un autre site. Les agents se trouveront donc corvéables à merci et des services pourraient être complètement désorganisés, les chefs de service n’ayant plus aucune autorité sur leurs agents.

* les TI parisiens vont servir de test puisqu’ils vont prochainement être regroupés pour passer de 20 juridictions de proximité à une seule entité monstre de 200 personnes, ce qui va complètement chambouler leur façon de travailler. Les agents des TI ont l’habitude d’être polyvalents, gérant plusieurs services ou ayant l’habitude de faire des remplacement de leurs collègues au sein de petites structures. Dans ce méga-TI ils vont être spécialisés et perdre toute la plus-value qu’ils avaient. Le service public de proximité cessera d’exister alors qu’il aurait pu être maintenu en créant 4 ou 5 TI au lieu de tout rassembler en un seul site titanesque (au sein du palais de justice des Batignolles). Mais nous n’avons pas été écoutés.

=> au niveau régional, des chambres détachées des cours d’appel ? Quelle place pour les SAR ?

Pour savoir ce qui nous pend au nez, il suffit de reprendre le projet Macron qui indique :

« Nous modifierons les ressorts des cours d’appel afin qu’aucune ne soit à cheval sur plusieurs régions administratives et qu’aucun département ne dépende d’une cour qui ne soit pas dans la même région que lui.

Là encore, cela ne nécessite pas de fermer les sites : tout en maintenant sur place l’activité juridictionnelle, l’administration (ressources humaines, gestion financière…) des cours d’appel plus modestes où l’activité est insuffisante pourra être maintenue mais uniquement comme échelon juridictionnel de proximité et non comme structure de gestion. »

Or la garde des sceaux a indiqué lors de la présentation des « chantiers de la justice » le 5 octobre que les « cours d’appels continueraient d’exister telles quelles ». Ces deux versions ne pouvant coexister, comment savoir ce qui est vraiment envisagé ? Est-ce une modification du ressort des cours d’appel en tant que juridictions ? Est-ce une modification du ressort des cours d’appel en tant qu’administration ? Ou les deux ?

Devant l’absence d’informations officielles, même si beaucoup sont persuadés que le nombre de cours d’appel sera ramené à 13 en métropole, nous ne pouvons que formuler des hypothèses sur les conséquences :

=> la création de chambres détachées des cours d’appel en remplacement de celles supprimées, ce qui pourrait obliger des agents à devoir changer de lieu d’affectation. Actuellement, de nombreux collègues sont inquiets sur leur avenir ;

=> le regroupement de SAR (services administratifs régionaux) qui aurait plusieurs conséquences : changement d’affectation des agents y travaillant, éloignement géographique entre le SAR et les juridictions alors que ces dernières ont besoin du SAR, baisse de la qualité des prestations des SAR alors que le Secrétariat Général du ministère envisage d’accroitre leur charge de travail et que de nombreux postes sont vacants ;

=> l’agrandissement du ressort des cours d’appel et la création des tribunaux départementaux pourrait entrainer la suppression des 581 postes de fonctionnaires placés auprès des chefs de cour (adjoints administratifs, greffiers et directeurs) qui sont actuellement en charge de remplacer des collègues qui sont en congés maternité ou maladie, de combler des postes vacants ou d’assurer des missions particulières. Ce sont pourtant des agents qui ont l’habitude d’être extrêmement polyvalents et qui sont toujours attendus avec impatience dans les juridictions ;

=> l’accroissement de la taille des cours d’appel aurait également pour conséquence une augmentation des délais de traitement alors que le PLF 2018 note que « le délai global de traitement par les cours d’appel ne cesse d’augmenter ».

Organisation et gestion : la justice complètement en marge

=> Réformes effrénées et non préparées :

A chaque année son lot de réformes non anticipées et mises en place avec des consignes tardives et sans moyens (tutelles majeurs, réforme de la carte judiciaire, hospitalisations sous contraintes, CPH, réformes pénales, etc…).

L’année 2017 aura été comme les autres avec la prise d’actes au SAUJ, la suppression de la juridiction de proximité dans les TI et le transfert du pénal dans les TGI à compter du 1er juillet. Les consignes sont arrivées au fil de l’eau voir après coup… Difficile pour les services de s’organiser ou d’anticiper dans ces conditions. Le manque d’accompagnement des juridictions est criant et frise parfois l’incompétence au vu du grand sentiment d’impréparation qui en émane trop souvent.

L’origine en est trop souvent le législateur qui fixe des délais impossibles à tenir et qui ne tiennent pas compte de la situation des juridictions qui gèrent trop souvent la pénurie.

=> une administration incapable de gérer ses bâtiments :

Le rapport de décembre 2017 de la cour des comptes dénonce la « fuite en avant » de la politique immobilière du ministère et c’est peu dire.

Nos juridictions subissent depuis trop longtemps une absence de vision à long terme ou de réflexion en la matière puisque tout un chacun se veut expert alors que, là aussi, les directeurs doivent avoir toute leur place : à quoi sert un MDE (magistrat délégué à l’équipement) alors que les RGPI (responsable à la gestion du parc immobilier) se développent dans les SAR ? A cela se rajoutent les différents interlocuteurs qui peuvent exister : SAR, DI (Département Immobilier des PFI) voire l’APIJ (Agence Publique pour l’Immobilier de la Justice) et qui amènent à se demander si quelqu’un tient vraiment la barre, d’autant que bien souvent, ces travaux sont effectués sans concertation et sans consultations des organes de dialogue social (notamment les CHSCT).

Après avoir connu de longues périodes de vaches maigres qu’ont payé certaines juridictions, voilà que l’argent a coulé à flots par périodes entre 2015 et 2016, pour des opérations budgétaires qui étaient attendues depuis souvent longtemps, via les crédits SAUJ ou PLAT (plan de lutte anti-terrorisme)…

Quelques exemples de situations critiques de juridictions :

– le TI de Sucy-en-Brie qui a finalement pu déménager en 2014 dans un bâtiment qui avait pourtant été acheté dans les années 90 ;

– le CPH de Villeneuve-St-Georges, qui a occupé pendant 30 ans des locaux « provisoires » qui ont brûlé en 2012 (les locaux étant vétustes) et qui finalement occupe toujours actuellement des nouveaux locaux « provisoires » ;

– le TGI de Créteil fait (enfin) l’objet de travaux de désamiantage plus de 30 ans après la découverte d’amiante et ce dans des conditions totales d’opacité (la CGT attend toujours une réponse à un courrier de novembre 2016) ;

– le TGI de Bobigny par son état de délabrement fait souvent les choux gras de la presse ;

– l’extension du TGI de Nanterre est sous la menace d’une fermeture par la commission de sécurité départementale, etc…

L’absence de programmation des opérations immobilières entraîne bien trop souvent soit des successions de travaux qui visent à réparer l’existant, sans penser à mettre en œuvre des opérations de maintenance préventive, soit des opérations qui viennent se superposer à des travaux effectués quelques mois auparavant dans l’urgence et donc sans vision d’ensemble.

De même, le manque de réflexion en matière de construction de nouveaux bâtiments laisse assez souvent dubitatif : trop souvent, aucune réflexion en amont, sans concertation, et que dire des nombreux problèmes que connaissent les tous nouveaux palais de justice dès leur inauguration (ex : le nouveau palais de Justice de Béziers inauguré avant d’être inondé deux mois plus tard ou encore celui de Grenoble qui est invivable en été). A cela on peut ajouter le manque de négociation de certains contrats dont le plus retentissant restera pour les dizaines d’années à venir le Futur Palais de Justice de Paris « négocié » à 2,7 milliards d’euros, mais actuellement estimé a minima à 3,5 milliards d’euros sans compter le coût du déménagement et celui de la société censée assister le TGI dans ce cadre. Comme disait Christine Taubira, « comme démonstration de bonne gestion, je crois qu’on a déjà fait mieux ».

=> un ministère complètement déconnecté informatiquement :

La nouvelle garde des sceaux ne jure que par le tout numérique, ce qui lui permet de justifier de la suppression de 183 postes, alors qu’il y a justement besoin d’agents techniques ou d’informaticiens pour gérer la numérisation et l’informatique.

Différents questionnaires ont été lancés par la chancellerie en guise de consultation. A leur lecture, le but est clair : le tout numérique, et notamment la saisine de la justice uniquement par la voie dématérialisée. C’est bien méconnaitre le public qu’accueille nos juridictions : précarité, parfois illettrisme, difficultés à écrire ou à expliquer ce qu’ils souhaitent. Les obliger à saisir nos juridictions par le biais d’internet, ce serait leur mettre une barrière de plus alors qu’a contrario, dans le même temps, on développe les SAUJ. Rappelons que depuis le mois de juin, les usagers ne peuvent plus formuler en lignes des demandes de copies de jugements pour des « raisons techniques »…

Nous avons besoin d’informatique, cela est certain mais, en matière de développement, le ministère n’est absolument pas exemplaire. Beaucoup craignent avec Portalis une réitération des errements qu’a connu le logiciel Cassiopée. Pour Portalis, le ministère reconnaît déjà un « léger surcoût » (+199%). Le Secrétaire Général du ministère refuse que les CHSCT soient consultés sur ce projet, refusant d’anticiper toute conséquence sur les conditions de travail des agents. Le logiciel MINOS (version de Cassiopée pour les contraventions) fait tourner en bourrique tous les agents des services pénaux depuis le transfert du tribunal de police aux TGI le 1er juillet 2017 : indisponibilité du logiciel, incompatibilités de versions, trames indisponibles, etc… Le logiciel Harmonie (pour la gestion des RH) est en cours de déploiement mais beaucoup déplorent le fait qu’il ne soit pas abouti.

Une réflexion sur la gestion informatique actuelle est donc nécessaire.

=> plusieurs reculs déjà annoncés pour les usagers :

La proposition de loi adoptée par le Sénat le 25 octobre, contient (en plus du projet de tribunal départemental) plusieurs propositions honteuses :

* retour de la contribution pour l’aide juridique (article 18) : c’est le retour du timbre fiscal dont nous avions obtenu la suppression. La réintroduction de ce dispositif est encore un moyen de s’attaquer aux plus faibles et de bloquer l’accès à la justice.

* la consultation obligatoire préalablement au dépôt d’une demande d’AJ (article 19) : on s’aperçoit que le lobby des avocats a encore frappé. Il s’agit là encore d’un moyen de bloquer l’accès à la justice et d’offrir un moyen à des auxiliaires de se payer sur le dos des usagers. C’est bien évidemment inadmissible.

Ne nous leurrons pas : un des buts des « chantiers » est d’instaurer partout la représentation obligatoire par les avocats à laquelle nous nous opposons totalement. La liberté de la défense n’est pas de choisir son avocat mais de choisir ou non un avocat pour défendre ses intérêts.

=> une privatisation rampante de la justice :

Un des buts de chantiers est de continuer de déjudiciariser, après plusieurs transferts déjà opérés aux profits des notaires : compétence partagée des PACS par une loi du 28 mars 2001 (il faut compter pour 230€) et compétence totale sur les divorces par consentement mutuel par la loi du 18 novembre 2016, avec la présence de deux avocats (et non plus d’un seul). Il faut désormais payer 50€ pour déposer une convention de divorce… Cette dernière réforme a été lancée sans aucune concertation ni étude d’impact, or nous connaissons actuellement un retour de balancier important.

Le développement des règlements dit amiables et autre modes de médiation n’a qu’un seul but : continuer à vider les compétences des juridictions et les mettre dans les mains de diverses professions qui ne cherchent qu’à gagner des parts de marchés aux dépens des usagers du service public de la justice. La loi du 18 novembre 2016 a également rendu la conciliation préalable obligatoire à compter du 1er juillet 2017, alors qu’il s’agit de l’une des fonctions premières des magistrats (article 21 du CPC).

La privatisation de la justice s’opère déjà sur plusieurs plans :

* marchés publics dans le cadre de la formation avec des prestations chères et parfois inutiles. La DSJ (21 000 agents) se justifie en disant qu’elle ne dispose pas des ressources internes, alors que la PJJ (9 000 agents) compte plus de formateurs qu’elle !

* appel à des sociétés privées pour l’entretien des bâtiments avec des prix cassés et des prestations douteuses notamment en fin de marché,

* appel à des prestataires privés pour l’entretien informatique : dans les DIT, 25% des effectifs sont des prestataires ;

* appel à des boites privées pour la conception de logiciels, ce qui entraine un surcoût important, notamment pour Cassiopée lancé il y a bientôt 10 ans et qui n’en fini pas d’évoluer : coût avec un écart de plus de 3 000% par rapport au projet initial, ainsi que des logiciels inadaptés ;

* augmentation du nombre de contractuels (+69% pour le Secrétariat Général du ministère entre 2001 et 2013 ; en 2013, la DSJ employait 3 267 saisonniers) et une multiplication du type de contrats : informaticiens, architectes, techniciens immobilier, délégués du procureur, magistrats délégués à titre temporaire (ex juges de proximité), vacataires; assistants de justice, juristes assistants, assistants spécialisés, réservistes (greffiers, directeurs ou magistrats), services civiques ou encore apprentis, etc… Chaque année, quand des crédits budgétaires se dégagent, les vacataires se retrouvent déployés dans nos juridictions pour deux ou trois mois, parfois même sans qu’il y ait de réels besoins. Et à chaque fois c’est le même scénario : il faut trouver un poste informatique et former le vacataire. Rappelons l’absurdité du système qui permet actuellement à un vacataire de prendre une audience après avoir prêté serment (article R123-14 du code de l’organisation judiciaire) !

NOS REVENDICATIONS POUR UN SERVICE PUBLIC DE LA JUSTICE :

Nous défendons un véritable service public de la justice, accessible, gratuit et de proximité. Aussi, nous revendiquons notamment (revendications non exclusives) :

– la création d’un service public de l’exécution des décisions de justice, assuré par le greffier. Cette évolution du métier de greffier, entrant pleinement dans son champ de compétence, permettrait, outre la création de nombreux postes, de simplifier les démarches des justiciables tout en diminuant le coût de l’exécution au regard des tarifs actuels des actes d’huissiers ;

– l’attribution au greffier de la notification des compositions pénales en lieu et place du délégué du procureur (dont nous demandons la suppression), notification dont le coût entraîne un alourdissement des frais de justice alors que nous manquons de moyens financiers dans nos juridictions ;

la suppression du système de la représentation obligatoire par avocat. La liberté de la défense n’est pas de choisir son avocat mais de choisir ou non un avocat pour défendre ses intérêts ;

l’élargissement considérable tant de l’assiette que des conditions d’accès à l’aide juridictionnelle (augmentation des plafonds a minima jusqu’au SMIC, prise en compte des situations de surendettement des particuliers, etc…) ;

la création d’un corps d’avocats fonctionnaires qui aurait vocation à assurer la défense des plus démunis éligibles à l’aide juridictionnelle (à noter que cette revendication a été reprise dans le projet Macron pour la Justice…) ;

la transformation de la justice commerciale en un véritable service public par la fonctionnarisation des greffes des tribunaux de commerce ;

le développement de l’accès au droit en donnant aux structures actuelles qui en ont la charge (CDAD, Conseil départemental de l’accès au droit, et MJD, Maisons de la Justice et du Droit) les moyens nécessaires d’assurer leur mission tant en terme de budget que de personnels (les postes de secrétaire général de CDAD doivent être assurés par des fonctionnaires et non des juristes-contractuels sous-payés, et des postes de greffiers doivent être ouverts dans toutes les MJD) ;

la réalisation d’un service d’aide aux victimes identique et pérenne dans tous les TGI en dotant les BAV de personnel judiciaire leur permettant de répondre réellement aux besoins en ayant ainsi accès à Cassiopée, au RPVJ (Réseau Privé Virtuel Justice), avec des horaires d’ouverture ni réduits ni fluctuants en fonction des conventions signées localement entre les chefs de juridiction et les associations assurant ce service ;

le transfert de la présidence des BAJ (bureaux d’aide juridictionnelle) aux directeurs  ;

l’intégration du droit alsacien-mosellan dans ses dispositions plus favorables en terme d’accès à la justice ;

Ceux dont on ne parle pas : quel avenir pour nos métiers ?

Dans tous les projets de chantiers, les agents sont les grands oubliés.

=> une dégradation des conditions de travail très inquiétante :

Tout d’abord un constat : nous connaissons une dégradation générale de nos conditions de travail. Ainsi les rapports 2016 de la médecine de prévention et de l’inspection santé et sécurité au travail ont dressé un bilan noir de la situation :

=> des modifications importantes de l’environnement professionnel qui « peuvent créer des facteurs déstabilisants pour les agents comme pour leur encadrement » ;

=> l’augmentation du nombre de tensions ;

=> « la dégradation des conditions de travail, générant des tensions dans les services pouvant déboucher sur des risques psychosociaux » ;

=> « de plus en plus de collectifs de travail en grande difficulté du fait de l’absence de temps et d’espaces pour débattre du travail » ;

=> l’écart « de plus en plus grand entre le travail prescrit et le travail réel » (c’est à dire l’écart entre les consignes et la façon dont le travail est effectué)

=> une « modification des organisations de travail insuffisamment anticipée et explicitée » (question d’actualité avec les nombreuses « méformes » mises en place sans accompagnement), etc…

Au sein de la DSJ, le taux d’absentéisme a grimpé entre 2012 et 2015 passant de 7,52% à 8,55%. Il faut dire qu’avec les nombreuses réformes, impliquant d’importants changements d’organisation, la charge de travail et le sous-effectif, les agents des services judiciaires sont constamment sous pression.

=> adjoints techniques : un corps complètement oublié par la DSJ :

Baisse constante des effectifs depuis 7 ans : Après 13 ans sans recrutement d’adjoints techniques (le dernier avait eu lieu en 2003), le ministère de la Justice en a enfin organisé un en octobre 2016 : 132 postes offerts dans les services judiciaires et la PJJ.

Chaque année des postes sont supprimés. Ainsi 5% l’ont été entre 2010 et 2017 et de nombreux postes restent non-pourvus (par exemple, sur le ressort de la cour d’appel de Paris, 17% des postes sont vacants). La charge de travail des adjoints techniques augmente du fait de la baisse des effectifs alors que nous avons besoin d’adjoints techniques pour développer la numérisation.

L’appel systématique aux sociétés privées s’intensifie, que ce soit en matière de maintenance, d’entretien, de sécurité ou d’informatique .

La plupart des postes de concierges sont supprimés pour faire appel (à un coût élevé) à des sociétés de sécurité. Par exemple, à Amiens, la suppression du poste de concierge a été décidée ce qui entraine un coût pour la juridiction de 4 500€ par mois pour faire appel à une société de sécurité.

Dans nos juridictions, les agents techniques sont dépossédés de leurs missions. Relégués dans des tâches administratives, bon nombre d’entre-eux finissent par demander leur intégration dans le corps des adjoints administratifs.

Une carrière bloquée : les services judiciaires n’ayant ni corps de B technique, ni de A technique, les adjoints techniques n’ont aucune perspective de carrière devant eux. Leur solution est donc de partir en détachement dans un autre corps de C technique, voire de partir en détachement dans le corps des adjoints administratifs, pour pouvoir espérer une évolution dans la catégorie B. Certains passent même le concours de greffier.

=> que fait la DSJ pour la filière administrative ?

Depuis le 1er janvier 2009, les personnels administratifs ont fusionné avec leurs collègues des Services Judiciaires, de la Protection Judiciaire et de la Jeunesse, de l’Administration Centrale, de la pénitentiaire, de la Grande chancellerie et se retrouvent dans un grand corps « Justice ».

Adjoints administratifs : La suppression des postes d’adjoints administratifs continue avec 1 322 postes supprimés entre 2010 et 2017 au profit des corps de greffiers et de secrétaires administratifs. Cela permet certains de profiter de passer en catégorie B. Cependant leur reclassement dans les conditions issues du protocole de juillet 2014, que nous n’avons pas signé, est une véritable catastrophe : avant les collègues de l’ex-échelle 6 (maintenant C3) avaient un gain d’entre 30 à 60 points d’indice majoré (jusqu’à plus de 100 points d’indice pour certains collègues). Avec la nouvelle grille indiciaire, ce gain n’est plus que de 5 à 14 points !

Secrétaires administratifs : Ce corps a été créé dans les services judiciaires sur revendication de la seule CGT. Le corps est en augmentation : 694 postes localisés en 2017 contre 576 en 2014. Il doit permettre une évolution de carrière pour les adjoints administratifs et doit surtout trouver pleinement sa place au sein de notre direction.

Conformément à une note de 2009, leur prime est fixe, contrairement à celles des autres agents pour lesquels elle est fixée selon un taux moyen et qui évolue donc avec le temps. Cette situation est incompréhensible. A croire que tout est fait pour faire fuir les SA…

Attachés d’administration : La localisation des postes en Centrale n’est pas diffusée, rendant difficile de connaître le nombre d’attachés s’y trouvant. Cependant, en 2016, la DSJ a créé 78 postes d’attachés dans les services déconcentrés (cour d’appel et TGI), mais là encore sans grande visibilité et surtout sans aucune concertation, et ce sur des fonctions relevant des compétences des directeurs. La DSJ a prévu de lancer une « mission d’évaluation » sur ces nouvelles fonctions…

=> greffiers : un corps en attente de reconnaissance :

Le projet de « greffier juridictionnel » pour décharger les magistrats : Les quatre rapports qui avaient été remis fin 2013 à la garde des sceaux de l’époque étaient unanimes : il faut décharger le magistrat sur le greffier, les uns arguant du manque de magistrats et les autres du niveau de recrutement actuels de greffiers (en 1987, nombreux parlaient déjà de greffiers sûr-diplômés). Cette unanimité était rejointe par l’UNSA-SJ, membre de l’Union Européenne des Rechtspfleger dont le livre vert indique que « le greffier européen doit servir à décharger (sic) les juges. » Le projet est tombé à l’eau, mais a été suivi de nouveaux statuts suite à la signature du protocole de juillet 2014.

De nouveaux statuts pour plus de travail : Les greffiers étaient partis du constat qu’ils voulaient une reconnaissance indiciaire de leurs tâches. S’ils ont eu une nouvelle grille indiciaire, ils ont également vu leurs fonctions évoluer par quelques modifications insidieuses. L’assistance du juge dans les actes a été étendue à l’assistance du parquet : en route pour les permanences parquet le week-end !

Avec les postes de B fonctionnels, les collègues vont « bénéficier » de quelques points d’indice en plus pour faire du travail de directeur : du travail de A avec une paye de B. Une avancée selon certains… .

Dès la signature du protocole de juillet 2014, la DSJ a lancé une nouvelle expérimentation, celles des GAM (greffiers assistants du magistrat) au sein des parquets afin de « permettre aux magistrats de se recentrer sur leurs tâches juridictionnelles ». Les procureurs ont vu arriver cette expérimentation d’un bon œil, et comme un moyen de mettre encore plus la main sur le greffe. Cette expérimentation, qui tend à être généralisée, des GAM va plus loin que la précédente des GARM prévue par les statuts de 2003. Quant à la rémunération…

Une grille indiciaire revue mais sans vision d’ensemble : la grille indiciaire des greffiers a été revue en 2015. Il était temps : le 1er échelon du grade de base commençait en dessous de la grille des catégories C. Le nouveau 1er échelon de 2015 démarre 2 points d’indice au dessus de la grille des catégories C, bien loin des revendications de la CGT.

Le grade supérieur de greffier commençait en 2015 à 31 points en dessous de l’ancien grade supérieur. Ainsi, en 2015, un greffier du 6e échelon reclassé dans le grade supérieur gagne 3 points d’indice, contre les 36 qu’il aurait gagné sous l’ancienne grille !

Postes fonctionnels : vers une casse des métiers :

Le statut d’emploi (créé par les nouveaux statuts de 2015 suite au protocole de juillet 2014), une première dans un corps de catégorie B de la taille de celui des greffiers (et pour cause !), ne constitue en aucun cas une avancée et ce pour bon nombre de raisons.

La DSJ s’est souvent vantée du succès des postes de fonctionnels. Pourtant la liste des postes à republier de greffiers fonctionnels parue en juin 2017, laisse penser le contraire : sur les 214 postes proposés, 46% étaient à republier ! Sur les 61 postes de chef de greffe qui étaient proposés, 50% sont à republier. Si, parmi ces postes, certains sont des créations récentes (TI Compiègne, TI Vienne…), d’autres ne trouvent toujours pas preneur au bout de deux ans comme le TI de Boulogne-sur-Mer, plaçant les agents de ces juridictions dans des situations difficiles.

Quelles sont les conséquences de ces créations de postes fonctionnels :

* une économie pour l’administration : les greffiers sous statut d’emploi sont employés sur des postes précédemment occupés par des greffiers en chef du 2ème voire du 1er grade et donc payés jusqu’à 1 200€ en moins par mois pour assurer les même fonctions ;

* des B fonctionnels formés au rabais : 4 semaines de formation « d’adaptation à l’emploi » (dont seulement une à l’ENG) au lieu de 18 mois pour les directeurs et ils ne sont pas ou peu accompagnés ;

* des agents sur siège éjectable : les greffiers et directeurs fonctionnels sont en position de détachement et en subissent les conséquences. Ils sont éjectables à tout moment puisqu’ils « peuvent se voir retirer cet emploi dans l’intérêt du service » (article 5 du décret) ;

* une perte de la spécificité des métiers : la création de postes fonctionnels a ouvert largement les corps de greffiers et de directeurs à l’ensemble des agents de grade équivalent issus d’autres directions ou d’autres ministères ce qui entraîne forcément une perte de la spécificité de nos métiers que la DSJ prétendait au contraire renforcer…

* des postes pourvus hors CAP, dans l’opacité.

=> qui veut la peau des directeurs ?

Les suppressions de postes se poursuivent : particulièrement dans les TI et CPH (76 postes supprimés entre 2015 et 2017). Ils sont remplacés sur ces postes par des B fonctionnels payés moins chers. De façon systématique, le corps des directeurs (ex. greffiers en chef) continue de diminuer : selon un document de la DSJ, en 2017 il n’y a plus que 1 604 postes de directeurs localisés (à opposer aux 1 789 GEC en fonction en 2013). Rappelons que lors d’une réunion à Paris, lors de la présentation de la réforme statutaire de 2014, un représentant de la DSJ avait lâché qu’au final il y aurait 500 postes supprimés… Lors des présentations de cette réforme en province, le ministère avait annoncé que ces postes seraient redéployés dans les TGI : en lieu et place, ce sont des postes d’attachés qui ont été créés.

Vers une fusion avec les attachés ? C’est une vieille ritournelle répandue par la DSJ depuis plusieurs années. La DSJ a même tenté de proposer en mai 2014 aux GEC la grille des attachés (moins favorable), mais elle a dû faire marche arrière face à l’opposition de la CGT. De même, la CGT a dû se battre à la même période pour que les fonctions juridictionnelles des GEC restent inscrites dans le statut, alors que l’UNSA-SJ cherchait au contraire à faire supprimer ces fonctions. Sans la combativité de la CGT, s’en était fini de la particularité de ce corps !

Rappelons que la loi J21 permet dorénavant, « à titre exceptionnel », aux greffiers chef de greffe d’être compétents en matière de délivrance des certificats de nationalité française et de vérification des comptes de gestion des tutelles, compétences auparavant exclusives des greffiers en chef et auparavant des magistrats !

Mais la DSJ a trouvé un autre moyen, corrélé à la suppression de postes, pour pousser les directeurs vers la sortie : la création de 75 postes d’attachés comme secrétaires généraux de juridictions. Cette création, dans le cadre du PLAT et sur injonction de la Fonction publique (ben voyons!) a ouvert une porte de sortie pour de nombreux collègues : si entre 2013 et 2015, seuls 5 GEC étaient partis en détachement dans le corps des attachés du ministère de la Justice, entre 2016 et 2017 ils sont 34 à avoir franchi le pas ! Cette fuite est préoccupante, puisque même le syndicat (de moins en moins) catégoriel CGC s’interroge sur l’intégration des directeurs dans le corps des attachés. Comme on dit, quand le bateau coule, les rats quittent le navire !

Les directeurs sous la menace des chefs de juridiction ? En plus des attaques portées contre le statut, il faut également voir les attaques portées sur les fonctions avec la main mise de plus en plus forte des magistrats sur le greffe avec le déploiement des GAM et des magistrats coordonnateurs de service. Autant d’occasions d’isoler les directeurs dans leurs fonctions de gestion. D’ailleurs, le 11 juillet, la Garde des Sceaux a déclaré qu’il fallait faire du magistrat un chef d’équipe entouré de greffiers : quelle place alors pour les directeurs ? Enfin, lors d’un récent colloque organisé par l’ENM sur l’organisation territoriale de la justice, sur interrogation d’un participant sur la place des directeurs, un des magistrats présent à la tribune a déclaré qu’il fallait « s’interroger sur la pérennité de certains métiers (sic !!) ». Tout cela laisse penser que les directeurs gênent et que certains veulent leur peau au profit des magistrats.

Quand les magistrats seront-ils recentrés sur leur métier ? Les recentrer sur leur métier (comme voulu par J21) consiste également à leur retirer les fonctions de gestion administratives ou budgétaires pour qu’ils puissent enfin se concentrer sur leur corps de métier qui est de dire le droit et de trancher les litiges. À quand la suppression des MDE (magistrats délégués à l’équipement) pour que l’immobilier soit enfin confié à des directeurs RGPI (responsables de la gestion du patrimoine immobilier) ? À quand une gestion budgétaire et technique des juridictions confiée uniquement aux directeurs comme dans les hôpitaux ? À quand des DDARJ (directeurs délégués à l’administration régionale judiciaire) uniques gestionnaires régionaux ? A quand des directeurs sur des postes administratifs occupés par des magistrats en Centrale ? Bref, quand chacun pourra-t-il se concentrer sur ses fonctions ? Un premier pas a été fait en créant des postes de secrétaires généraux en juridictions, mais ce sont des postes d’attachés !

Nous ne pouvons que reprendre (une nouvelle fois) les propos du sénateur Jean ARTHUIS, rapporteur de la mission sénatoriale HAENEL/ARTHUIS en septembre 1990 : « Le ministère de la justice est extraordinairement centré sur lui-même, auto-administré, les magistrats ont toujours considéré qu’ils devaient prendre en charge eux-mêmes l’administration de leur ministère et qu’ils devaient tout à la fois être experts en relations humaines, en gestion financière, en informatique, en construction ou en programmation, autant d’exigences qui à chaque fois ont été des échecs retentissants ». Au bout de 27 ans, il serait donc temps de devenir réaliste !

NOS REVENDICATIONS (non exhaustives) POUR LES AGENTS :

Pour les adjoints techniques :

=> fusion du corps des adjoints techniques avec celui de la pénitentiaire ;

=> création de corps de B et A techniques ;

=> création d’une plateforme d’agents techniques ;

Pour les corps administratifs :

=> augmentation du nombre de SA ;

=> reclassement, après l’obtention du C en B, dans des conditions à minima aussi favorables qu’avant la réforme d’octobre 2015 ;

Pour les greffiers :

=> revalorisation des fonctions exercées par les greffiers ;

=> l’alignement de la grille des greffiers sur celle des CPIP (qui vont passer en catégorie A en 2019) ;

=> suppression des postes de fonctionnels ;

Pour les directeurs :

=> pouvoir exclusif pour les directeurs de leurs responsabilités et attributions, les magistrats devant être recentrés sur leurs missions de dire le droit et de trancher les litiges ;

=> ouverture de discussions sur la gouvernance des juridictions ;

Pour l’ensemble des agents :

=> recrutement de fonctionnaires en lieu et place des emplois précaires déployés

=> indexation des grilles indiciaires sur le coût de la vie comme pour le SMIC ;

=> reconstruction de l’ensemble de la grille des fonctionnaires en partant des catégories C sur la base des revendications de la CGT ;

Catégorie

Objectif de la CGT

Grille actuelle

Début de grille

Fin de grille

Début de grille

Fin de grille

C sans qualification

1 SMIC

2,4 SMIC

1 SMIC

1,4 SMIC

C par concours niveau CAP-BEP

1,2 SMIC

2,4 SMIC

1 SMIC

1,4 SMIC

B niveau Bac

1,4 SMIC

2,8 SMIC

1,01 SMIC

1,82 SMIC

B niveau Bac+2

1,6 SMIC

3,2 SMIC

1,06 SMIC

1,82 SMIC

A niveau Bac +3

1,8 SMIC

3,6 SMIC

1,19 SMIC

2,54 SMIC (2e grade)

3,13 SMIC (3e grade)

EN CONCLUSION, nous dénonçons une situation générale qui se dégrade totalement et qui ne semble pas vouloir évoluer :

* mise en difficulté de façon systématique des juridictions par le ministère ou la DSJ : pression hiérarchique sur l’ensemble des agents, notamment via les multiples demandes de statistiques…, pression budgétaire poussant à des restrictions tant en matériel ou en immobilier, réformes mises en place du jour au lendemain sans apports, etc…

* pression des chefs de juridictions et de cour sur les agents ;

* isolement des cadres et leur manque de formation aux techniques managériales ;

* manques de recrutement : plus de 10 ans sans recrutement d’adjoints techniques, années sans recrutement de GEC…, plombant parfois de façon durable certaines juridictions ;

* manque d’accompagnement des primo-fonctionnaires affectés en région parisienne qui, mis en difficulté, ne demandent qu’à muter ;

* conséquences des réformes statutaire : suppression de postes de GEC remplacés par des B mettant ces derniers en situation de fragilité (manque de formation, problème de positionnement, etc…), précarisation du personnel avec la mise en place des emplois fonctionnels, manque de reconnaissance des agents par leur rémunération, etc…

Le bilan de la situation est donc préoccupant. A l’administration d’en tirer les leçons avant d’envisager toutes nouvelles réformes. L’administration doit, dans ce cadre notamment, veiller à la restauration d’un dialogue social tant au plan national que local.

Paris le 12 janvier 2018

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