Courrier collectif à Bruno LE MAIRE

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Monsieur le Ministre,


Le mercredi 15 décembre 2021, à midi, les organisations syndicales signataires appellent les personnels de justice à manifester devant votre ministère à Bercy.

Cette action forte, doublée d’un appel à la grève nationale des magistrats et fonctionnaires des greffes, témoigne d’un très grand malaise.

Une récente tribune, qui a récolté plus de 7000 signatures dans le milieu judiciaire, a mis en évidence la fracture ou l’incompréhension qui sépare la ligne adoptée par le gouvernement sur les sujets de justice, du profond mal-être exprimé par les hommes et les femmes qui assurent le fonctionnement de l’institution judiciaire.




Monsieur Bruno LE MAIRE
Ministre de l’Economie, des Finances et de la Relance


La position officielle des plus hautes autorités de l’Etat se résume par les points suivants :
– la justice compte assez de personnels, on serait arrivé au « bon chiffre » s’agissant des magistrats, et il serait  simplement utile de recourir à quelques nouveaux recrutements sous forme de « sucres rapides » pour donner sens à la notion d’équipe autour du juge et du greffier.
– la justice aurait davantage besoin d’être réorganisée et managée de manière différente plutôt que de bénéficier de moyens supplémentaires dont l’augmentation, au cours des dernières années, n’aurait pas donné lieu à l’objectivation d’une performance améliorée.
– le budget de la justice prévu pour 2022 serait un budget historique pour la justice à même de répondre à ses difficultés.

Pourtant, de nombreux témoignages de personnels en difficulté ont été publiés dans la presse, dans un contexte de parole libérée. Toutes les annonces officielles ne peuvent résoudre la question lancinante de la souffrance au travail des personnels de justice. Ces derniers n’en peuvent plus : manque criant d’effectifs, vacances de postes et absence de prise en compte des diverses situations de congés qui impliquent une indisponibilité de personnels très supérieure à toutes les estimations officielles. Les comparaisons avec les moyennes européennes (celles de la CEPEJ en particulier) prouvent que la France est à la traîne avec un nombre de personnels de greffe, de juges et de procureurs très inférieurs à la moyenne européenne.

Les burn-out se multiplient, les temps de repos ne sont pas respectés et l’organisation de la justice se complaît dans les audiences de nuit ou la recherche de solutions de fonctionnement dégradées.

Le monde judiciaire crie sa souffrance et personne ne l’écoute car les décideurs estiment avoir déjà proposé les solutions. Le ministère de la Justice, avec lequel nous sommes engagés depuis dix ans sur des travaux pour établir des référentiels objectivant les besoins, nous oppose par ailleurs que la méthodologie à adopter ne peut être celle proposée par les organisations représentatives, en raison de la position de votre ministère sur la forme qu’ils doivent prendre.

Nous souhaitons vous rencontrer parce que le budget dont vous avez la responsabilité n’est pas à la hauteur des enjeux et des problèmes que nous mettons en avant.

Nous souhaitons vous dire notre souhait d’un plan budgétaire bien plus ambitieux pour la justice, afin de lui faire rattraper enfin son retard historique.

Nous voulons vous parler de questions humaines, du sens du travail, ainsi que du respect des hommes et des femmes. La recherche du moindre coût ou de la démonstration de la performance (au sens budgétaire) ne peuvent que conduire à la catastrophe humaine ou à la perte de sens dans le travail, qui implique aussi une perte de sens pour les avocats dans leur mission de défense.

Nous voulons vous parler de la considération due aux personnels de justice, qui passe par le respect de leurs syndicats comme interlocuteurs crédibles et suppose aussi un effort salarial, à l’instar de ce qui a pu être entrepris dans d’autres secteurs régaliens.

Les syndicats et organisations signataires demandent à être reçus auprès de vous le mercredi 15 décembre 2021, à l’occasion de la manifestation que nous organisons à midi devant votre ministère dans un total esprit républicain.

Parlons justice mais parlons vrai !



Pour toutes les organisations ci-dessus :
Céline Parisot, Présidente de l’Union syndicale des magistrats (USM)
0143542126

 

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