Déclaration liminaire à la CAP des greffiers du 4 mai 2023

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LA MESSE EST DITE !

Depuis, le début de l’année, le mensonge qui rampait dans la bouche de notre ministre est devenu mot d’ordre et se retrouve désormais sur toutes les lèvres de nos gestionnaires : « La justice est réparée ». Aujourd’hui, l’argent coule à flot, les vannes du recrutement sont ouvertes, les moyens mis sur la table et la révolution numérique nous ouvre les bras. Il n’y plus aucune raison de s’inquiéter, mais on ferme quand même le robinet des détachements… Circulez, il n’y a rien à voir !

La justice est réparée…

Pour l’administration, la messe est dite.

Mais qui peut croire sincèrement une telle fable ?

Ce discours est tenu dans toutes les instances, dans les audiences de rentrées, devant les nouvelles promotions de l’ENM et de l’ENG. Tout va bien maintenant, rassurons les nouvelles recrues, il faut seulement « rationaliser les process », « accompagner le changement », « optimiser l’utilisation des ressources », « développer les soft skills », « transformer les encadrants en coaching-managers »… Bientôt, on nous demandera d’augmenter les profits de l’entreprise justice alors que la DACG rédigera les préventions avec ChatGPT…

Pourtant les agents savent bien que rien ne s’est amélioré depuis la Tribune des 3000 et cette CAP illustre parfaitement le management du ministère. Des greffiers stagiaires menacés de non titularisation ou de prolongation car réticents à faire des heures supplémentaires, ne souhaitant pas participer aux permanences, n’étant pas des soutiens suffisamment productifs pour leurs collègues, ne pouvant pas se permettre de quitter leur travail après 22h00…

Ces jeunes collègues qui doivent apprendre leur métier sont déjà en situation de stress, de surcharge de travail et sont assimilés aux effectifs alors qu’ils sont censés être en formation ! Des services qui ne tiennent que grâce aux stagiaires, exploités à épurer les stocks des jours durant. C’est donc cela que l’on appelle une « justice réparée ».

Pourtant, les choses sont simples. Posez la question à un greffier.  « Quelles solutions pour réparer la justice ? ». Il vous donnera rapidement une réponse, marquée du sceau de l’évidence : augmenter les effectifs dans les services, investir dans des logiciels opérants, rénover le parc immobilier, recruter des adjoints administratifs et techniques, améliorer l’accueil des nouveaux arrivants, revaloriser l’indiciaire et l’indemnitaire de tous les personnels de greffe, appliquer ces revalorisations indemnitaires aux nouvelles promotions auxquelles elles sont dues, mettre en œuvre une véritable politique d’attractivité de nos métiers… En bref, redonner aux greffiers les moyens d’exercer correctement, dignement et efficacement leurs missions. De les exercer dans le respect de leur statut, de leurs droits et du code de travail. De leur redonner le sens de leur profession et surtout, l’envie de rester dans leur corps.

 

Il y a trois mois, lors de la première CAP, nous exprimions nos réserves quant à l’organisation de deux concours de greffiers et de quatre rentrées par an. Nous les réitérons aujourd’hui, notamment parce que nous savons que c’est le premier pas vers une diminution du temps de scolarité et ce alors même que l’administration n’a jamais mis en œuvre les moyens suffisants et nécessaires pour permettre la formation continue de tous les agents, même lorsque celle-ci est obligatoire et indispensable.

D’ailleurs, les IRA, qui avaient fait le choix d’une diminution du temps de scolarité, font aujourd’hui machine arrière…

Le flot des candidats se tari, et multiplier les concours en baissant progressivement le niveau d’exigence aura pour seul effet de plonger les services judiciaires dans la même crise que celle que traverse l’éducation nationale. Depuis longtemps déjà les juridictions tirent la sonnette d’alarme : les conditions d’accueil des stagiaires sont de plus en plus mauvaises, la carence de leur formation et les difficultés liées à leur recrutement les placent dans des situations de fragilité et les exposent à des souffrances professionnelles. Face à la machine judiciaire, qui broie déjà quotidiennement ses agents, comment blâmer un manque d’investissement, un découragement ou des compétences insuffisantes à nos stagiaires ? Et, on vous arrête tout de suite : ici nous ne parlons pas des promos covid sacrifiées sur l’autel de la crise sanitaire…

Si l’on en croit le rapport d’activité 2021 de la DSJ, il y aurait 10 177 greffiers. En additionnant tous les recrutements depuis la promotion historique de septembre 2016, c’est plus de 5 000 greffiers qui ont été recrutés, soit la moitié du corps. On nous dit que 1 500 greffiers supplémentaires seront recrutés alors que déjà un greffier sur deux à moins de 5 ans d’expérience… On pourra plonger la cruche à l’eau avec plus d’ardeur encore, si elle est trouée, rien ne changera. Les départs, en détachement, en mutation, en disponibilité ou suite à un concours sont de plus en plus nombreux. Les greffiers abandonnent le navire et pourtant, ce n’est pas faute pour la DSJ de faire obstacle par tout moyen aux demandes de nos collègues. Nous sommes au bord du naufrage… et la charge de travail, qui se reporte, est de plus en plus lourde pour ceux qui restent. Rester, mais à quel prix ? Celui de l’épuisement et du manque de reconnaissance de la spécificité de notre métier.  

On pourrait aussi parler des brigades de volontaires, créées pour pallier les manquements de l’administration, qui sont envoyées au front sans aucune munition ! Les problématiques en outre-mer sont connues mais les réponses apportées insuffisantes… Aujourd’hui, encore plus avec l’actualité judiciaire, il n’est plus possible de taire la souffrance des agents ultra-marins. Si les moyens alloués sont dérisoires et les conditions de travail très largement dégradées, l’administration pourrait au moins leur accorder un minimum de considération. On part de tellement loin que cela serait déjà un grand pas.

Enfin, par on ne sait quel procédé chimique, le ministre souhaite transformer les « sucres rapides » en « sucres lents ». Si l’on ne peut qu’applaudir la cédéisation des précaires, on peut comprendre que cette nouvelle soit accueillie avec des réserves par les greffiers et dans les juridictions.    

Beaucoup de questions, peu de réponses, zéro dialogue mais une seule certitude : les greffiers attendent depuis trop longtemps déjà un geste de reconnaissance de l’administration et 2023 sera l’année de l’espoir ou l’année des désillusions.

C’est dans ce contexte compliqué, où beaucoup de questions et d’enjeux devront être débattus, que nous souhaitons la bienvenue à la nouvelle Sous-Directrice des Ressources Humaines.

Vos Élues CAP CGT SJ

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