Protocole d’accord sur la « revalorisation des métiers de greffe » – Notre analyse détaillée

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Protocole d’accord sur la « revalorisation des métiers de greffe »

Notre analyse détaillée

Avancées significatives, avancées relatives, reculs, points bloquants, vous trouverez ci-dessous notre analyse très détaillée sur le contenu de ce protocole.

Éléments de contexte

La CGT des chancelleries & services judiciaires (CGT CSJ) publiait le 29 mai 2020, un tract intitulé « Nous sommes les infirmières de la Justice ! »1, afin de mettre un nouveau coup de projecteur sur les conditions de rémunération des greffiers.

Dès son arrivée place Vendôme en juillet 2020, la CGT CSJ, comme d’autres organisations syndicales, a insisté sans relâche auprès d’Eric Dupond-Moretti et de la DSJ pour que les greffiers soient enfin revalorisés de manière conséquente.

Malgré cela, il a fallu attendre début 2022 pour que le sujet commence à être abordé avec les organisations syndicales. Malheureusement, le directeur des services judiciaires ne souhaitait, à ce moment-là, en discuter que dans le cadre de réunions bilatérales.

Pour la CGT CSJ, au regard des enjeux d’un tel sujet, les discussions doivent nécessairement se faire dans un cadre multilatéral, qui permet le plus de transparence – ou le moins de magouilles. C’est ce qui a conduit la CGT CSJà suspendre la participation à toute bilatérale avec le DSJ.

Dans le même temps, la CGT formalisait, avec FO justice et la CFDT, une demande d’entrée en négociations dans le cadre prévu par les textes fonction publique. Le DSJ opposait une fin de non-recevoir, en essayant tant bien que (plutôt) mal de respecter les textes.

Alors que, des échos que nous avions, était discuté en bilatérale avec les autres OS, le passage en A d’une partie seulement des greffiers, si nous n’avons pu obtenir à ce moment-là les négociations souhaitées, les discussions en bilatérale ont été mises en échec.

Immédiatement après les élections professionnelles qui se sont tenues du 1er au 8 décembre 2022, le DSJ réunissait les OS représentatives pour leur faire part d’un agenda de discussions, avec une revalorisation des greffiers uniquement indiciaire dans un premier temps – 2023, puis des discussions statutaires à partir de fin 2024.

Début 2023, le DSJ soumettait aux OS représentatives une grille indiciaire, non pas identique, mais basée sur la grille des CPIP de 2018. La CGT CSJ reprenait les échanges en bilatérale du fait d’un cadre enfin multilatéral, et disait et écrivait que, si la grille proposée allait dans le bon sens, certains points méritaient d’être revus et qu’il était important de veiller à ne pas négliger le reclassement2. La discussion sur le reclassement était fixée au printemps par le DSJ.

Lors d’une réunion en mai sur les mesures indemnitaires, le DSJ abordait laconiquement la question du reclassement, qui se ferait selon la règle fonction publique classique… Lors d’une bilatérale avec la CGT CSJ, il ne donnait pas plus de détails, malgré nos attentes… et son engagement !

L’ensemble des OS convenait de demander un entretien avec le directeur de cabinet pour demander des marges de manœuvres financières plus importantes.

FO diffusait les grilles sans autre commentaire que le reclassement à l’indice égal ou immédiatement supérieur début juin, ce qui a rapidement mis les greffes en colère.

Le 26 juin dernier, les OS représentatives rencontraient le directeur de cabinet du ministre (qui occupe désormais le même poste auprès de la première ministre…), rencontre qui se terminait par ce « conseil » : « ce serait bon pour tout le monde si on faisait baisser la pression dans les juridictions »!

Le 11 juillet, les CGT du ministère de la justice rencontraient la secrétaire générale du ministère en bilatérale. Sur interpellation de la CGT CSJ, le RH du ministère annonçait qu’il y aurait une surprise de taille le 12 juillet.

Le 12 juillet, le DSJ mettait en discussion un protocole d’accord de méthode, feignant faire suite aux discussions entamées en début de réunion. Sitôt le protocole signé, nous écrivions : « Au final, avec cet accord de méthode, nous avons le sentiment que l’agenda ministériel sur l’évolution des métiers du greffe n’est pas vraiment modifié, il suffit pour cela de constater le maintien de l’attaché de justice dans le projet de loi examiné au Parlement. »4

Les différentes réunions fixées par le calendrier des « négociations » se sont apparentées à des réunions d’information lors desquelles nous étaient distillés les éléments de la réforme envisagée par le DSJ. Il n’y a pas eu de réelles marges de négociations, tout juste des mises en scène pour tenter de le faire croire.

Suite aux 6 réunions, dont l’une initialement fixée le dernier mercredi de septembre, date habituelle de présentation du budget de l’année suivante, un protocole d’accord nous était soumis. Il convient maintenant de l’examiner à l’aune de nos revendications et des formulations utilisées.

Enfin, il est important de souligner que ces soi-disant négociations se sont déroulées dans une ambiance difficile et ce, jusqu’à la fin de la dernière réunion, avec un DSJ qui manipule les propos tenus, par écrit ou par oral, par les représentants CGT, tentant de discréditer nos positionnements, nos revendications. Pas de doute possible, si certains en doutaient encore, nous sommes bien en Macronie…

Les avancées importantes contenues dans le protocole d’accord

  • La fin du statut d’emploi de greffiers

La CGT fonction publique est opposée au statut d’emploi puisque, de par sa nature, il porte atteinte au statut général des fonctionnaires. Un fonctionnaire est titulaire de son grade, pas de son emploi.

Avec le statut d’emploi, il n’est plus titulaire de son grade, qu’il peut perdre à tout moment puisque l’emploi fonctionnel s’obtient par détachement, est provisoire et qu’il peut être mis fin au détachement prématurément. Ce dernier élément constitue par ailleurs une atteinte indéniable au principe d’indépendance du fonctionnaire.

La CGT CSJ était d’autant plus opposée à la mise en place de ce statut d’emploi que cela créait un précédent : il n’y avait alors qu’un corps de catégorie B, s’il existe encore, qui connaissait un tel statut et avait une volumétrie bien différente de celui des greffiers, pour ne compter qu’environ 500 agents.

Qu’il soit enfin mis un terme à cette anomalie (issue du protocole de 2014) dans le statut général ne peut être qu’un point positif.

  • La fin de l’échelon spécial

La CGT est attachée à un déroulement linéaire de la carrière des fonctionnaires, basé sur l’ancienneté. L’échelon spécial (issu du protocole de 2014), contingenté par nature, est par conséquent totalement inéquitable puisqu’il ne permet pas à tous les fonctionnaires d’une grille d’atteindre cet échelon et l’indice majoré qui va avec.

Le retour de la linéarité pour la fin de carrière des greffiers permettra à tous ceux qui ont l’ancienneté nécessaire d’atteindre cet échelon et l’indice majoré correspondant, et ainsi permettre aux greffiers détenant cet indice pendant au moins 6 mois de voir calculer la liquidation de leur pension sur cette base-là.

Là aussi, c’est une mesure de justice évidente pour la CGT.

Les avancées relatives contenues dans le protocole d’accord

La fin du dispositif des « faisant fonction »

C’est une ancienne revendication de la CGT CSJ :

  • comment justifier qu’un agent ayant un niveau de recrutement inférieur, voire même recruté sans concours, et donc une grille de rémunération inférieure exerce les missions d’un agent ayant un niveau de recrutement supérieur et donc une grille de rémunération supérieure ?

  • comment justifier la spécificité du corps des greffiers si un agent de catégorie C, voire même un auxiliaire ou un vacataire (art. R 123-14 du COJ), peut exercer les missions du greffier sans la formation initiale, en prêtant simplement serment ?

La seule explication à cela n’est pas une justification : le nombre de greffiers en poste n’a jamais été à la hauteur des besoins du service public de la justice ! L’exploitation des adjoints administratifs a permis pendant de longues années au service public de la justice de tenir, tant bien que mal, certes.

C’est d’ailleurs la CGT qui est à l’origine de la création des concours/examens professionnels de C en B à la suite du protocole d’accord du 6 janvier 1989.

La contre-réforme de 2014-15 s’engageait à y mettre un terme, mais sans mettre fin aux dispositifs, le tout accompagné d’un dispositif d’avancement régressif par rapport à ce qui existait précédemment.

Cette fois, ce qui est prévu va plutôt dans le bon sens :

  • suppression du dispositif des « faisant fonction » figurant dans le COJ ;

  • requalification dans le corps des greffiers des adjoints administratifs faisant fonction, avec nomination sur place.

Cependant, il y a plusieurs limites :

  • seulement 700 adjoints administratifs pourront bénéficier du reclassement, sans critère prévu par l’accord ;

  • de trop nombreuses juridictions ne peuvent actuellement pas fonctionner sans adjoints administratifs faisant fonction ; il est clair que le recrutement de 1 800 greffiers entre 2022 et 2023 sera insuffisant pour renforcer les juridictions à hauteur des besoins ;

  • pour les adjoints administratifs faisant fonction qui ne souhaiteraient pas devenir greffier, rien n’est prévu ;

  • alors que cela fait des années que le sous-effectif d’adjoints administratifs rend difficile le fonctionnement de nombreux services, les recrutements ne sont toujours pas à la hauteur et rien n’es prévu par l’accord ;

  • le cadre de discussion, en lien avec le secrétariat général du ministère, sur la question de la cartographie des groupes RIFSEEP des adjoints administratifs n’est pas clair.

La réduction de la carrière des greffiers restant en B

Il convient tout d’abord de préciser que 75 % des greffiers des services judiciaires resteront en B .

En l’absence de revalorisation indiciaire significative, un des moyens d’améliorer le traitement d’un fonctionnaire est d’accélérer le déroulement de sa carrière, ce qui se traduit par la suppression de 4 années dans le grade de base et de 3 années dans le grade principal.

A noter tout d’abord que la DSJ ne va pas au-delà de l’alignement sur la grille du B-type, une ambition très modérée.

Cette réserve étant faite, nous pouvons constater que, pour le grade de base, la réduction accélère le déroulé de carrière dès le début de grade (1er et 2ème échelon) puis pour les 8ème et 9ème échelons, ce qui fait qu’il ne reste que 3 échelons dont la durée est égale ou supérieure à 3 ans.

En revanche, le choix de supprimer l’ancien 11ème échelon de greffier principal a été maintenu, ce qui aboutit à une réduction de 3 ans, mais en toute fin de carrière, plutôt que d’appliquer la logique du grade de base et de réduire la durée des échelons, voire comme le demandait la CGT CSJ, de supprimer le premier échelon.

Cette logique et notre proposition auraient permis une revalorisation réelle de tous les greffiers principaux, plutôt que les seuls greffiers en fin de carrière.

Enfin, concernant l’amélioration de classement des greffiers promus dans le grade principal, il ne s’agit que d’un engagement, étant précisé qu’un engagement a le mérite, pour l’administration, de ne rien lui coûter… Notre proposition de suppression du 1er échelon réglait la difficulté de facto, proposition non retenue

Or, sans la suppression du 1er échelon, des collègues auront toujours un « gain » de 0 points au moment de leur reclassement et sur plusieurs années…

La « reconstitution des effectifs du garde de greffier principal » :

Le protocole d’accord de 2014 prévoyait que le corps des greffiers comprenne 40% de greffiers principaux. Au vu des effectifs du corps, il devrait actuellement y avoir 4 500 principaux. Il n’y en a que 2 800… Encore une obligation non respectée par la DSJ.

Sur la base théorique du passage en A des 2 800 principaux, la DSJ « s’engage » à demander à la fonction publique d’obtenir un statut dérogatoire quant au taux de promus / promouvables pour qu’entre 1 800 et 1 950 greffiers puissent devenir greffier principaux en 3 ans, afin de reconstituer en partie le grade. Et la DSJ ne précise pas combien de greffiers remplissent les conditions pour passer l’examen professionnel…

Par ailleurs, la DSJ est contradictoire puisque cette année, pour l’examen professionnel de 2023, elle a mis un frein supplémentaire en décidant de ne pas comptabiliser les 18 mois de formation dans les 3 ans de services effectifs demandés… Ce qui est un moyen de restreindre le nombre de candidats (et donc pour l’administration de faire des économies lors de l’organisation de l’examen professionnel).

Les reculs contenus dans le protocole d’accord

La grille indiciaire des B

Pour rappel, la grille entrée en application le 1er novembre 2023 avait fait l’objet d’un avis défavorable majoritaire lors du CSA ministériel du 6 octobre (pour : FO avec 5 voix ; abstention : CFDT avec 1 voix ; contre :UNSA/USM avec 6 voix et CGT/SM avec 3 voix).

Signer l’accord revient, quoi qu’on en dise, à valider cette grille, qui est largement en-deçà de ce qui avait été proposé en début d’année par la DSJ, et plus largement encore de la grille défendue par la CGT CSJ.

Pour rappel, les écarts entre l’ancienne grille et la grille imposée n’étaient pas de 22 points maximum comme c’est le cas avec cette grille, mais jusqu’à 70 points pour la grille proposée en début d’année par la DSJ, et 87 points pour la grille CPIP défendue par la CGT.

Les organisations syndicales et collègues qui réclament 25 points pour tous sont donc bien loin de nos revendications… et bien proches de ce qu’a imposé l’administration…

Le protocole d’accord présente la grille des B « à compter de 2024 » contenant les réductions de durée d’échelons évoquées ci-dessous. Mais le protocole ne dit pas un seul mot sur le reclassement dans cette nouvelle grille ! Si l’on veut que les collègues ne perdent dans l’ancienneté, il faudrait qu’ils soient reclassés non à échelon égal, mais à l’ancienneté !

Les points bloquants contenus dans le protocole d’accord sur la revalorisation des métiers de greffe soumis à signature

La création d’un nouveau corps de catégorie A

Malgré les circonvolutions et déformations tant de l’esprit que de la réalité par le DSJ, la création d’un nouveau corps, fut-il qualifié de « corps de débouché », a bien pour conséquence la scission du corps des greffiers.

Et plusieurs éléments militent plus qu’aisément dans ce sens-là :

  • en matière de statut général des fonctionnaires, toujours lui, un corps signifie un statut et les statuts connaissent des évolutions différentes. Ainsi, le corps des greffiers en chef, qui était pourtant pendant longtemps le corps naturel de débouché des greffiers, a subi un sort bien différent de celui des greffiers en 2014-15 et ce n’est malheureusement pas terminé ;

  • hors période transitoire, le corps de « A juridictionnel » sera accessible par concours externe ;

  • des missions supplémentaires.

Si c’est bien la grille du « A type » qui s’appliquera à ce nouveau corps, l’enthousiasme de celles et ceux qui voient les indices majorés en face de chaque échelon risque de vite tomber une fois le vernis craquelé.

  • Contrairement à ce que l’on peut lire ici ou là, ce n’est pas à missions constantes. Le « A juridictionnel » pourra être amené :

    • à exercer les missions du greffier B ;

    • à faire de l’encadrement de premier niveau ;

    • à exercer des « missions d’expertise procédurale au titre de certaines matières techniques ou de certains services spécialisés » – on ne sait toujours pas exactement de quoi il s’agit !

    • à exercer les missions juridictionnelles dévolues jusqu’ici aux DSGJ.

  • Concernant les heures supplémentaires, pour celles et ceux qui en doutent encore ou qui continuent de se référer au mauvais texte, la FAQ de la DSJ publiée le 21 septembre reprend, comme la CGT CSJ avant elle, le texte adéquat. Ainsi, l’article 2 du décret n°2002-60 du 14 janvier 2002 prévoit que les heures supplémentaires peuvent être versées aux fonctionnaires de catégorie C et B.

Les fonctionnaires de catégorie A ne peuvent donc « que » récupérer leurs heures supplémentaires.

Les camarades de la CGT IP sont également dans ce cadre et nous ont confirmé que pour la récupération des heures supplémentaires effectuées, les CPIP n’y arrivent pas.

  • Un autre aspect, outre ceux liés à la multiplicité des missions et à la charge de travail, est la question de l’autorité hiérarchique du « A juridictionnel » et cet aspect n’a pas de réponse certaine à ce jour… à moins de croire le DSJ sur parole, ce qui serait un pari très risqué.

Sur la question, plusieurs éléments font craindre le basculement sous l’autorité hiérarchique du magistrat :

  • le garde des sceaux et le DSJ (ainsi que l’USM, serait-on tenté de dire) ne cessent de parler d’équipe autour du magistrat ;

  • l’attaché de justice créé par la loi de programmation sera sous l’autorité du magistrat ;

  • le « A juridictionnel » est une passerelle possible vers cet attaché de justice ;

  • le DSJ était affirmatif lors de la première réunion de « négociations », pour lui cela ne faisait pas de doute ; c’est lorsqu’il a vu, par la suite, les levées de bouclier des OS et des collègues qu’il a évacué la question ; insister n’aurait pas permis de donner le vernis nécessaire pour vendre son projet ;

  • un statut ne prévoit pas l’autorité hiérarchique à laquelle le corps sera soumis ;

  • le statut des DSG pourrait le prévoir… ou pas ; et les discussions sur la filière administrative sont reportées à plus tard (cf infra) ;

  • il est possible d’envisager que que le futur statut des A juridictionnel pourrait prévoir qu’ils soient placés sous l’autorité hiérarchique des magistrats qui se retrouverait « chef d’équipe », tel que différents projets le font dessiner depuis plusieurs années. Le COJ n’assure aucune protection pour les agents puisque actuellement, l’art. R123-5 du COJ prévoit notamment que « dans le respect des dispositions d’ordre statutaire propres à chacune des catégories de personnel intéressées et en se conformant aux dispositions en vigueur, le directeur de greffe assure la gestion du personnel du greffe et l’organisation générale du service de celui-ci ». Le DSGJ pourrait tout à fait se retrouver simple gestionnaire et ce d’autant plus que la question des DSGJ a été « écartée » manu militari par le DSJ, permettant à ce dernier d’augmenter le flou…

  • rappelons que depuis le statut de 2015, les greffiers rédigent selon les « directives » des magistrats et non plus selon leurs « indications ». De nouvelles modifications pourraient survenir…

  • Sur la constitution initiale du corps, l’accès au « A juridictionnel » par la voie de l’examen professionnel pour tous les greffiers justifiant d’au moins 4 années de service effectif est pour le moins totalement contradictoire avec la spécialisation qui est censée caractériser, selon les dires mêmes de l’administration, ce nouveau corps.

Comme pour d’autres éléments de l’accord, cet aspect-là n’a d’autre objectif que calmer la colère des greffes mais est totalement injustifiable.

Par ailleurs, le projet final s’est vu « enrichi » d’un engagement supplémentaire, celui relatif à l’accès au 2ème grade du A pour les greffiers fonctionnels, visant plus à faciliter la signature d’une organisation syndicale qui réclamait cet accès pour tous les principaux. Cela s’apparente ni plus ni moins qu’à une forme de racolage…

Parmi les « engagements » de la DSJ figure celui de « demander à la fonction publique des conditions de reclassement améliorées pour les greffiers principaux dans le 1er grade de la grille de A type ». Là encore un engagement qui ne coûte rien. La DSJ sera tenue d’appliquer les conditions actuelles de reclassement de B en A, en l’espère l’article 6 du décret 2006-1827… Tous les greffiers qui seraient nommés dans ce corps de A juridictionnel seront nommés dans le 1er grade.

  • Sur les voies pérennes d’accès au corps, les personnels n’en ont pas terminé avec les mensonges de l’administration. Dans un premier temps, ce nouveau corps décrit comme un corps de débouché des greffiers devait être accessible par le concours interne pour obtenir la grille de A type, et non pas par la voie de l’examen professionnel, qui ne permettait d’obtenir qu’une grille de petit A : à ce moment-là, il nous était expliqué que c’est la fonction publique qui imposait ces critères.

Désormais, la fonction publique impose que le « A juridictionnel » soit également accessible par voie de concours externe pour bénéficier de la grille A type…

Est-ce que ça peut vraiment être autre chose qu’une surprise ?

Le DSJ nous a ensuite présenté le fait que ce concours externe ne soit limité qu’à 15 % des recrutements. Elle a cependant renoncé à un engagement, celui de faire en sorte que le concours externe ne soit que facultatif. C’était trop gros pour passer ?

Il nous est donc vendu de l’expertise procédurale à portée de main de tout agent de la fonction publique. Cela ne serait pas totalement contradictoire si la formation suivait, mais !

Par ailleurs, la DSJ vend le fait d’être greffier principal comme la voie d’accès « royale » au corps de A juridictionnel. Le protocole prévoit que pour être promu au choix, il faudra avoir atteint le 5ème échelon du greffier principal et au moins 5 ans de service effectif dans le corps des greffiers. Soit au final au moins 14 ans d’ancienneté… Alors que pour être promu au choix dans le corps de DSGJ, il n’y a pas de conditions de grade et il faut seulement 9 ans de service public (les années comme catégorie C peuvent donc compter) et au moins 5 ans dans un corps de catégorie B.

  • Quant à l’évolution de carrière au sein de ce nouveau corps (composé de trois grades !), rien ne figure dans le protocole d’accord (contrairement au protocole de 2014) ! Cependant, il est facile de se rendre compte que les seuls qui pourraient avoir une « vraie » évolution de carrière dans le corps seront les recrutement par concours externe, concours interne ou les catégories A (dont les DSGJ) qui entreraient dans le nouveau corps par la voie du détachement… le grade de greffier principal ne seraient plus qu’un cul de sac.

Le protocole ne dit rien quant à l’objectif de pourcentage de répartition des grades au sein du corps. Pour comparaison, le protocole de 2014 fixait les pourcentages de répartition au sein des grades, que la DSJ s’est attachée à ne pas respecter…

  • Mais la formation fera l’objet d’une adaptation individualisée pour les greffiers, sans plus de détails, et d’une « formation statutaire » pas plus précise pour les lauréats du concours externe.

Au regard de l’activité et des difficultés actuelle de l’ENG, des conditions de travail des équipes pédagogiques et administratives, mais également des positions du DSJ sur l’actuelle formation initiale des greffiers comme des directeurs (il estime que 18 mois de formation, c’est long et il opère une comparaison hasardeuse avec la formation aux IRA), il y a fort à parier que l’ambition soit limitée.

  • Grand seigneur, la DSJ « s’engage » à demander à la fonction publique « à ce qu’il soit inséré au sein du statut particulier une disposition assimilant la formation statutaire à des services effectifs dans le corps ».

Pourquoi cette incise ? Parce que, de façon unilatérale, la DSJ a dernièrement décrété que la durée de la formation à l’ENG n’était plus comptabilisée dans la durée des services effectifs requis dans les conditions pour passer l’examen professionnel de principal ! C’est évidemment se moquer du monde car le Conseil d’État prévoit expressément que « à défaut de disposition expresse en sens contraire, la notion de services effectifs inclut ceux qui ont été accomplis comme non-titulaire ». De plus, la DSJ pourrait tout à fait d’elle même proposer de clarifier les statuts de greffier et de directeur en précisant que les services effectifs comprennent la période de stage…

  • Quel devenir pour le corps des greffiers B ? C’est la grande inquiétude exprimée par de nombreux collègues suite à l’annonce de la création de ce corps de A. Nous l’avons déjà écrit, la réforme laisse de côté sur le plan indiciaire 75% du corps. Mais sur le plan des missions, sur l’attrait du corps ? Que va devenir le corps des greffiers B ? Ne sera-t-il du coup plus qu’un « choix » par dépit lors du passage des concours ? Par ailleurs, le grade principal ne deviendrait plus qu’une phase de transition avant le passage dans le corps de A. Quand on sait que le métier peine déjà actuellement à recruter, autant dire que la suite est inquiétante.

Le report de la réflexion sur la filière administrative

Comment avoir une vision de l’équipe du greffe et la clarification nécessaire des missions des uns et des autres lorsque les discussions sont morcelées ?

D’autant que les modifications des missions des DSGJ se sont vues amputées d’un certain nombre d’entre elles, toutes juridictionnelles, sans qu’il n’y ait eu la moindre réflexion sur le rôle, la place et les missions des DSGJ !

La haute magistrature n’a jamais accepté la création du corps des greffiers en chef (DSGJ depuis 2015). Le corps avait des compétences administratives et juridictionnelles, ce justifiait notamment d’avoir une meilleure grille que celle des attachés.

En supprimant progressivement les attributions des GEC/DSGJ, il y a de moins en moins de différences avec le statut des attachés d’administration, et les grilles se sont rapprochées…

Il s’agit là d’une nouvelle attaque contre le corps des DSGJ, corps au sein duquel, rappelons-le, la CGT est le syndicat majoritaire.

Ce report est une violation de l’accord de méthode du 13 juillet et le fait que, à la lecture du protocole, on comprend que c’est un objectif (p. 2) sur lequel l’administration s’engage (p. 7) ne règle pas le problème (un objectif sur lequel on ne s’engagerait pas ne serait plus un objectif…)

Par ailleurs, quelle qu’en soit la formulation, le fait de sortir de l’accord de méthode pour s’engager auprès des signataires d’un autre accord, accord qui porte lui pour l’essentiel sur toute autre chose que la filière administrative comporte un risque juridique évident.

Faut-il y voir derrière un objectif caché de la DSJ avec pour résultat la fusion des DSGJ et des attachés ? Par ailleurs, on pourrait imaginer que des collègues DSGJ soient tentés de partir dans le corps de A juridictionnel, notamment au vu des possibilités supplémentaires de mobilité offertes par ce nouveau corps et des conditions de reclassement avantageuses dont ils bénéficieraient. Un moyen de continuer de liquider le corps des DSGJ…

Conclusion

L’administration s’engage à 7 reprises dans ce protocole à… demander à la fonction publique, ce qui ne coûte rien à l’administration mais ne rapporte absolument rien aux agents.

Cela coûte d’autant moins que, pour faire signer, il y a toujours plein d’engagements possibles et que, lors du comité de suivi, il n’y a en général plus que les restrictions et nouveaux reculs qui sont envisageables par l’administration… Étant noté que beaucoup de choses sont renvoyées aux discussions avec les signataires…

Montreuil, le 9 novembre 2023

2Pour tous les articles relatifs aux discussions et « négociations » statutaires, c’est ici : https://cgt-justice.fr/negociationsindiciaires-et-statutaires-article-de-suivi/

3https://cgt-justice.fr/communique-commun-suite-a-lentretien-avec-le-directeur-de-cabinet-du-ministre-de-la-justice/

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